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Athènes, belle et rebelle.

publié le 05/06/2018 | par Maria Malagardis

La capitale grecque mérite mieux qu’un quart d’heure sur l’Acropole et quelques clichés sur ses embouteillages. Pour qui sait flâner, elle cache des recoins insoupçonnés. Cité rebelle, branchée, balnéaire, nous sommes partis (re)découvrir Athènes…


Bien sûr, l’appel de la mer est souvent le plus fort: pour l’écrasante majorité des voyageurs qui arrivent en Grèce (ils devraient être trente millions pour l’ensemble de l’année en cours), Athènes reste encore trop souvent un simple lieu de passage. Une zone de transit entre l’aéroport international et Le Pirée, d’où partent la plupart des ferries offrant la possibilité d’une île et ses promesses de farniente.

Et si toutefois, contraints ou malgré tout curieux, certains s’attardent un peu dans la capitale grecque, combien encore se contentent d’une virée sur la colline mythique de l’Acropole, certes dotée désormais d’un magnifique musée? Athènes mérite pourtant bien plus qu’un quart d’heure d’extase face à la majesté du Parthénon.

Car les apparences sont trompeuses : le touriste pressé ne retiendra souvent de sa parenthèse athénienne qu’un paysage monotone d’immeubles en béton ou au mieux, le charme un peu kitsch du quartier de Monastiraki, au pied de l’Acropole, confortant ainsi le préjugé d’une ville privée d’harmonie, bruyante et chaotique. «Polluée» dit-on souvent, alors qu’elle se révèle désormais bien moins toxique qu’un grand nombre de capitales européennes.

Surtout depuis que la crise a contraint bien des citadins à renoncer à la voiture. On lui préférera donc le métro, nettement plus agréable que celui de Paris ou de Londres, voire les taxis, plutôt bon marché, et omniprésents aux quatre coins de la ville.

La nostalgie d’un âge d’or

Certes Athènes ne s’apprivoise pas facilement, mais pour ceux qui se donnent la peine de s’y attarder, la capitale grecque réserve bien des surprises. Comme ces oasis discrètes, qui offrent parfois une bouffée de verdure et témoignent toujours de la persistance d’un art de vivre nonchalant, malgré tant d’années d’austérité imposée par les créanciers du pays. Cette ville ruinée, appauvrie, regorge de jardins secrets nichés parfois au cœur même du béton.

Bien plus, l’asphyxie économique n’a pas empêché la ville de se développer et de se renouveler, présentant désormais une offre culturelle variée et diversifiée. Ce qui n’empêche pas les Athéniens d’exprimer souvent la nostalgie d’un âge d’or perdu, ces périodes plus prospères et insouciantes qui ont marqué l’histoire récente, avec l’essor de lieux mythiques.

Justement, certains ont été récemment réhabilités ou sont en phase de l’être. En jouant cette carte du «vintage», qui remet à l’honneur une dolce vita qu’on croyait disparue, mais aussi en s’accrochant à ses rituels, Athènes présente un visage, plus audacieux, plus glamour, non dénué d’une certaine frivolité.

Mais elle reste également une capitale rebelle, régulièrement secouée par des mouvements de colère, dont les stigmates sont lisibles à travers les rues entièrement taguées qu’on trouve au centre-ville. Cet esprit d’insoumission, on le retrouve vite en allant dîner ou prendre un verre dans le quartier anarchiste d’Exarchia, ou encore à Kessariani, quartier «rouge» et haut lieu de la Résistance à la Seconde Guerre Mondiale.

Aujourd’hui en observant l’animation aux terrasses de cafés, toujours bondées, le visiteur aura peut-être l’impression qu’Athènes, où vit près d’un tiers des onze millions de Grecs, résiste plutôt bien aux malheurs les plus récents. Il y a pourtant des quartiers dévastés, ces silhouettes qui errent et mendient dans la rue, sans qu’étonnement cette misère récente n’ait jamais débouché sur une explosion de la délinquance.

Sous le béton, la plage

Alors oui, on peut légitimement considérer qu’après tout Athènes résiste bien et se réinvente. Mais cette ville où se croisent les influences de l’Europe, des Balkans et de l’Orient a aussi un atout irremplaçable qui l’aide certainement à survivre: ce climat béni des Dieux, et la proximité de la mer, ultime remède au désespoir. Une équation qu’on pourrait résumer d’une formule: Sous le béton, la plage. Celle qui se trouve à portée de tramway, non loin d’un lac mystérieux.

«Dans toutes les histoires, tout finit bien et tout le monde se retrouve à la plage» répétait comme un leitmotiv Melina Mercouri dans «Jamais le dimanche» le film tourné par Jules Dassin au Pirée. La plage, mais aussi cet irrésistible appel de la mer qui hypnotise tant de touristes, se trouve donc aux portes de cette capitale paradoxale.

A la fois bétonnée et parsemée d’oasis, parfois ultra-chic et toujours tout aussi destroy, constituée de mille enclaves et autant de villages comme les mille facettes d’un kaléidoscope qui se métamorphose en permanence.

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