Armée d’Israël : vent de fronde chez les réservistes
Aviateurs, unités blindées, marine, officiers de l’état-major et même cyber-renseignement : un vent de révolte souffle chez les réservistes israéliens contre la poursuite de la guerre

L’appel de 950 aviateurs réservistes et retraités, publié le 10 avril, continue à susciter réactions et remous dans le pays, à la veille de la semaine de célébration de la Pâque juive.
La pétition demande l’arrêt d’une campagne militaire hasardeuse
Les aviateurs ont appelé au retour des otages, vivants ou morts, encore détenus par le Hamas, même au prix d’une cessation immédiate des combats. Conscients de l’émoi que cette initiative pourrait susciter, et afin de recueillir un soutien le plus large possible, l’appel se garde bien de prôner quelque forme d’insoumission ou de refus de servir dans l’armée. Il choisit de s’adresser directement au gouvernement pour demander l’arrêt d’une campagne militaire hasardeuse qui «sert principalement des intérêts politiques et personnels, et non la sécurité de l’État d’Israël». En clair, la campagne voulue et déclenchée à Gaza par le gouvernement Netanyahou
Sanction : les pilotes réservistes exclus de l’armée
Signé par un grand nombre d’officiers supérieurs de haut rang, y compris l’ancien chef d’état-major Dan Halutz, l’appel déclare également que « la poursuite de la guerre ne contribue à aucun de ses objectifs déclarés, et que seul un accord peut permettre le retour des otages en toute sécurité, alors que la pression militaire entraînera la mort des otages, de soldats de Tsahal et de civils innocents ».
L’armée de l’air et l’état-major ont essayé, sans succès, de dissuader les initiateurs de publier cet appel dérangeant. La réaction ne s’est pas fait attendre : dès le lendemain, il a été décidé que les pilotes signataires encore réservistes en service actif seraient tout simplement exclus de l’armée.
« Chaque jour qui passe met la vie des otages en danger. »
Si l’appel des aviateurs s’est fixé pour objectif d’élargir la mobilisation de l’ensemble de l’armée, il s’adresse également à tous les citoyens israéliens., et se conclut en affirmant : « Chaque jour qui passe met la vie des otages en danger », et « chaque instant d’hésitation supplémentaire est une honte ».
La réponse citoyennes est venue sous la forme d’une pétition ouverte à tous – « Soutenons les aviateurs sauvons Israël ». Malgré les fêtes, le texte a commencé à circuler dès vendredi et a déjà recueilli près de 60 000 signatures.
Les enseignants, chercheurs et les spécialistes du cyber-renseignement aussi
Dès le lendemain, 11 avril, la protestation s’est étendue : un appel similaire circulant au sein des blindés et de la marine a recueilli les signatures de centaines d’officiers en retraite ou encore en activité. Plus significatif encore, des réservistes de la prestigieuse unité 8200 du cyber-renseignement se sont joints au mouvement le même jour.
En parallèle, une autre pétition circule dans le monde universitaire. Elle a déjà recueilli la signature de 1 850 enseignants et chercheurs des différents instituts de recherche et universités du pays, y compris du centre universitaire d’Ariel, installé dans les territoires occupés de Cisjordanie.

Netanyahou perd ses nerfs
Face à cette mobilisation forte et rapide des secteurs civils et militaires les plus prestigieux et respectés, le gouvernement, répond par la hargne. Benjamin Netanyahou s’est permis d’utiliser le compte X réservé aux communications officielles du gouvernement pour calomnier et injurier les protestataires, les qualifiant de « retraités bruyants », d’« anarchistes » et de « mauvaises herbes qui affaibliraient le pays ». Il semble oublier que sa coalition gouvernementale tient grâce à des partis politiques ultra-religieux qui refusent les obligations du service militaire, alors que l’armée est en déficit d’effectifs.
Le symbole amer de la Pâque juive
À la veille de la commémoration de la libération des Juifs de l’esclavage d’Égypte, beaucoup sont choqués qu’un Premier ministre de l’État d’Israël se permet d’injurier ceux qui expriment leur douleur et leur solidarité envers les « esclaves israéliens » d’aujourd’hui, encore détenus par le Hamas à Gaza.
Pendant le repas cérémoniel du premier soir (Seder) de la Pâques juive, on rappelle les dix plaies infligées par Dieu à l’Égypte. On pourra les comparer, cette année, à celles infligées à la population d’Israël par son propre gouvernement.
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