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Deux Algérie : fracture entre le régime et son peuple

publié le 14/01/2025 par grands-reporters

L’Algérie est aujourd’hui traversée par deux lectures opposées : l’officielle, des médias d’État et le pouvoir, et la rue, qui reflète un mécontentement croissant 

Un régime en perte de crédibilité

Le pouvoir en place s’appuie sur une élite clientéliste et les « khemmesses », comparés aux figures serviles de l’ère coloniale. Ce groupe sert de pilier social à la dictature. Cependant, une majorité écrasante de citoyens rejette ce système, comme en témoignent les récentes élections truquées.

Malgré la répression, cette opposition silencieuse, souvent discrète par crainte des représailles, trouve un écho au sein des universités, de l’armée et même de l’appareil d’État. Mais avec Abdelmadjid Tebboune, arrivé au pouvoir en 2019, le régime a atteint un niveau inédit de médiocrité, tant sur le plan des ressources humaines que des politiques publiques.

Isolement international et contestation intérieure

La tentative de Tebboune et de son chef d’état-major, Saïd Chengriha, de restaurer le modèle idéologique de Boumediène n’a fait qu’aggraver l’isolement international de l’Algérie, tout en exacerbant le rejet populaire. Ce rejet est désormais perçu comme une menace sécuritaire par des militaires influents, qui réfléchissent à des alternatives pour éviter une dérive anarchique.

Sur le plan social, la situation est critique. La grève des étudiants en médecine, ignorée par la presse mais relayée sur les réseaux sociaux, mobilise massivement malgré la répression. Ces jeunes, parmi les plus qualifiés, dénoncent un régime incapable de répondre à leurs aspirations, amplifiant ainsi la fracture entre le pouvoir et la société.

Un régime paranoïaque et autoritaire

La paranoïa du régime, exacerbée par l’effondrement de son allié syrien, le pousse à accuser des complots internationaux dirigés par des puissances occidentales et Israël. Les contestations populaires, comme le hashtag viral « Je ne suis pas satisfait ! », sont réprimées violemment, des dizaines de citoyens ayant été emprisonnés.

Quant à l’affaire Boualem Sansal, une amnistie présidentielle annoncée pour apaiser la pression internationale n’a toujours pas été publiée. Tebboune, dans un discours incendiaire devant le Parlement, a attaqué l’écrivain en le qualifiant d’agent de la France. Ce discours, partiellement censuré par les médias officiels, illustre les divisions au sommet de l’État.

Une diplomatie parallèle pour contrôler la diaspora

Depuis 2020, le régime s’est doté d’une Agence algérienne de coopération internationale, disposant d’un milliard de dollars, pour mener une diplomatie parallèle. Officiellement dédiée à la coopération économique et culturelle, cette structure est en réalité un outil de surveillance et de contrôle de la diaspora algérienne, notamment en France.

L’Algérie, isolée sur la scène internationale et contestée à l’intérieur, semble enfermée dans une spirale de répression et d’incapacité à se réformer. Le bras de fer entre le régime et son peuple ne cesse de s’intensifier, laissant entrevoir une situation de plus en plus périlleuse pour l’avenir du pays.


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