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Gaza, une guerre sans règles

publié le 07/04/2025 par Pierre Haski

Banalisations des crimes de guerre, blocus humanitaire, assassinat des ambulanciers, interdiction des journalistes internationaux, politique ouverte de nettoyage ethnique…

La version israélienne de la mort de 15 humanitaire palestiniens est contredite par une vidéo. Mais ça ne changera rien à cette guerre qui ne respecte aucune règle. Dans ce contexte, Emmanuel Macron est en Égypte, mais cette rare initiative diplomatique aura du mal à peser dans l’immédiat.



Netanyahou, appuyé par Trump, piétine toutes les lois de la guerre

Dans un autre contexte international, c’est le type d’événement qui aurait provoqué un tollé, et qui aurait même été susceptible d’interrompre une guerre. Dans le fracas du monde actuel, avec Donald Trump à la Maison-Blanche, qui donne un blanc-seing à tout ce que fait Israël, c’est un incident de plus dans la longue litanie de la guerre dans la bande de Gaza.

Le 23 mars, l’armée israélienne a tué 15 secouristes et personnels humanitaires palestiniens dont les corps ont été découverts enterrés dans le sable à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza. Initialement, l’armée israélienne a affirmé avoir tiré sur des « terroristes » et des « véhicules suspects » en pleine nuit.

Mais le Croissant rouge palestinien a diffusé samedi une vidéo de six minutes filmées de l’intérieur d’un des véhicules, et découverte sur le téléphone portable d’une des victimes. On y voit la colonne de véhicules avançant avec des gyrophares allumés, sans ambiguïté, jusqu’à ce que les tirs se fassent entendre. L’armée israélienne a évoqué de possibles « erreurs » dans sa communication. Mais pour le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les droits humains, Volker Türk, il pourrait s’agir d’un « crime de guerre ».

Vraisemblablement, les suites d’une telle affaire seront nulles

Depuis le 7 octobre 2023 et cette nouvelle conflagration israélo-palestinienne, les crimes de guerre sont légion, des deux côtés. La Cour pénale internationale a d’ailleurs visé aussi bien les dirigeants du Hamas, responsables du massacre du 7 octobre et de la prise d’otages, que les dirigeants israéliens dont la riposte dépasse de très loin le droit d’un État agressé à se défendre. Sans effet puisque le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou, visé par un mandat d’arrêt de la CPI, vient de visiter Budapest et se trouve aujourd’hui à Washington ; sans être inquiété.

La guerre qui a repris depuis un mois se déroule sans aucun respect du droit international, à commencer par le blocus de l’aide humanitaire depuis le 5 mars par Israël. Les deux millions de Palestiniens de Gaza sont soumis aux privations, aux bombardements, aux déplacements d’un bout à l’autre du territoire.

Le sort des otages encore aux mains du Hamas passe au second plan, au grand dam d’une partie de la population israélienne. Cette double tragédie se déroule sans témoins – la presse internationale est toujours interdite d’accès à Gaza par Israël –, et dans la passivité du reste du monde.

Qu’attendre de la France ?

Dans ce contexte, Emmanuel Macron est aujourd’hui en Égypte, l’une des rares initiatives diplomatiques dans un monde gagné par les rapports de force. Un sommet à trois se déroule ce lundi, entre la France, l’Égypte et la Jordanie ; mais il ne faut pas en attendre un impact immédiat. Rien, aujourd’hui, ne peut peser sur la stratégie israélienne, surtout quand celle-ci est en partie dictée par des considérations de politique intérieure dans l’État hébreu, et qu’elle est cautionnée par Trump.

Mais la France vient apporter son soutien au plan arabe pour Gaza, adopté en réponse à celui de Trump visant à vider Gaza de ses habitants palestiniens et de le transformer en « Côte d’Azur ». Les pays arabes n’en veulent pas, et ont besoin du soutien de l’Europe pour faire barrage au plan américain adopté par Israël.

La France est également à l’origine d’une réunion sur la Palestine, co-organisée avec l’Arabie saoudite, qui aura lieu en juin au siège des Nations Unies à New York. Mais dans le désordre mondial aggravé par les dernières décisions de Donald Trump, le sort des Palestiniens ne pèse pas lourd. Les 15 humanitaires tués à Rafah en sont le triste symbole.

Retrouvez la chronique de Pierre Haski sur France Inter


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