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« Shell Shock » ou comment revenir de la guerre.

publié le 02/02/2020 | par Jean-Paul Mari

Une pièce de théâtre présentée par la Compagnie Loba.


Quand la Compagnie de théâtre Loba m’a demandé d’être le parrain d’une de ses pièces en précisant que le sujet était « Shell Schock », l’ancien « vent du boulet » ou, aujourd’hui, le Syndrome traumatique (PTSD), j’étais très curieux de lire le texte qui allait être mis en scène, joué par une seule personne, dans un espace théâtral, livré à la seule force de la parole.

Comment dire l’indicible sans prétendre le montrer ? Comment mettre des mots sur le Néant de la mort, l’Horreur, le tabou, indicible et inaudible, le contraire d’une pièce de théâtre ? Comment mettre en scène ce que nous, humains, n’avons pas le droit de voir, ou alors une seule fois, au moment de notre mort? Et surtout, comment y parvenir en mettant non pas la mort funeste, mais l’humain et les mots de la vie au centre de la scène ?

Photographies illustrant Shell Shock, la création 2019 de la compagnie LOBA – Annabelle SERGENT

Le thème est d’une simplicité absolue : une femme photographe grand-reporter rentre de la guerre d’Irak. Mais rentrer n’est pas revenir. Elle a un enfant, des photos que son journal attend, mais d’autres images de la guerre qui occupent tout son espace mental.

La première lecture du texte de l’auteure, Magali Mougel, a balayé tous mes doutes. Pour écrire une pièce d’une heure et quart de cette force, il fallait avoir eu la force et le courage de s’immerger pendant plus d’un an dans les profondeurs du mal, plonger pour en ré émerger, porteur de la seule chose qui nous lie entre nous, la seule chose qui nous sauve : les mots de l’humain.

Restait à le jouer et à le mettre en scène. Un décor à minima, un personnage, incarné par Annabelle Sergent, mince, fragile, mais si forte, de la lumière, parfois quelques coups de téléphone en voix off. Rien ou si peu. Mais une nudité spectaculaire. Le trauma au plus près, comme une voix intérieure. Et dans la salle du théâtre de Bayeux ce soir-là, un silence absolu avec, à la fin du spectacle, cette muette sidération qui marque la communion avec ce voyage au cœur du texte.

 

Photographies Delphine Perrin

Le talent de l’écriture, le talent de l’actrice, une mise en scène à l’os, la sincérité pour seule arme et une émotion sans pathos, toute de souffrance, de tendresse et d’amour. Se mettre à nu sans s’exhiber ? Magnifique performance.

Je suis heureux et honoré d’être le parrain de ce spectacle qui a, j’en suis sûr, un bel avenir devant lui. Et qui sera donné dans toute la France ( voir ci-dessous) pour le plus grand profit et bonheur de ceux qui auront la chance d’y assister.

De mon côté, je serai, une fois le rideau retombé, aux côtés d’Annabelle et de la Compagnie Loba chaque fois que je le pourrais. Pour continuer, avec le public, à explorer cette partie de nous-mêmes, comme une initiation à un autre monde, plonger dans la nuit, pour en revenir, éprouvé certes, mais plus fort, en amoureux indéfectible de la lumière de la vie.

 


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