Jean-Paul Mari présente :
Le site d'un amoureuxdu grand-reportage

Stage Grands Reporters. Journal complet d’une semaine au cœur du reportage, jour par jour.

Bloc-Notes évenements Photos publié le 12/03/2022 | par Jean-Paul Mari

Première journée de stage !

Arrivée en train ou en voiture. Tempête la veille, voie encombrées et donc …retard de 40 minutes. Installation rapide dans les chambres. Café. Groupe de huit stagiaires. De tous âges, hommes et femmes. Passionnés d’écriture, de photojournalisme et de vidéo.

La méthode du stage axée sur le « Comment faire ».

 

Toute l’équipe des stagiaires. De gauche à droite. Olivier Sarrazin, Dominique Secouet, Sébastien Simon, Isabeau de Rouffignac, Alexandre Larcan, Eva Gueye, Patrick Bar, Romane Bosset. (DR)

Première Master Class : « Qu’est-ce que le grand-reportage ? » Matière, exigences, éthique, mode de vie, en quête.

Déjeuner et discussion avec intervenant. Visite rapide de l’Hermitage, propriété Tiers-lieu innovant de 30 hectares sur un site historique 14-18.

Master-Class : « le grand saut ». Atelier immersif collectif. Constitution équipes pour concevoir deux reportages : écrit-photo et vidéo sur « Les gangs d’Haïti ». A l’issue, pitch, analyse, critique.

Dans le même temps, entretiens individuels à tour de rôle sur objectif du stage pour chacun et projet futur.

Diner. Projection « Émission Reporters » avec Daniel Grand Clément pour « Les martyrs du Golfe d’Aden ». Film impressionnant, démonstration spectaculaire de l’engagement nécessaire à la réalisation d’un reportage (récompensé par le Grand Prix Figra ).

Analyse, critique, débat, questions-réponses. Dernier verre sr la terrasse. Rendez-vous demain

Au programme demain mardi : « Comment photographier ? » Avec Joël Robine.

 

Stage Grands-Reporters : J+2 « Comment photographier?» avec Joël Robine.

 

Grosse journée. Nos stagiaires avaient faim de photo, Joël les a régalés. Premier module le matin  juste après le petit-déjeuner: Particularité de l’image, traitement, cadrage, matériel, budget, éditing et surtout la qualité du regard, tout est étudié en profondeur, théorie et pratique.

J +2: deuxième journée de stage :  » Comment photographier? » avec Joël Robine?

 

Joël Robine, ( au centre ) photographe, et toute l’équipe de stagiaires. DR

A l’évidence, les futurs reporters sont séduits par Joël, son personnage pince sans-rire de poète vagabond qui cache un formidable photojournaliste, vingt-huit années au sien de  l’AFP, une panoplie de terrains de guerre, Irak, Bosnie, Kosovo, Guatemala, Libéria, etc. où Joël était toujours au bon endroit.

En agence, on voit les photos, pas le photographe, Joël est pourtant un professionnel hors du commun dont les images ont fait la Une des journaux.

Des scènes dures, celles de la guerre, mais toujours fines et humaines, comme lui.

Au déjeuner, on l’entoure, on le presse de questions, il répond, précis, fait rire en racontant comment il s’est fait dépouiller en Albanie avant de se retrouver… en caleçon sur une route de montagne! Fou-rire. Puis retour en salle de travail, atelier pratique, chaque photo est analysée, les bonnes et les mauvaises, les scoops et les ratages. Deux heures de travail. Je redoute la saturation. Les stagiaires en redemandent.

Jean-François Leroy, directeur du festival « Visa pour l’image », ou la passion du photojournalisme.

Intervention de Jean-François Leroy, l’âme de Visa pour l’Image à Perpignan. Jean-Francois , sa passion, sa culture de l’image, son exigence, ses colères. Grand moment.

 

Romane Bosset, étudiante en journalisme, stagiaire.

Retour en salle de travail avec Joël à la demande des stagiaires…qui en veulent plus!  Images, décryptage,  débat. Il faut les arrêter au bout d’une heure et demie!

Projection des « Portes de l’enfer » de Noël Quidu, autre grand calibre du photojournalisme. C’est fort, c’est dur, c’est puissant. On en ressort un peu sonné.

Debriefing sur la terrasse. Et café.

Joséphine, de l’organisation de l’Hermitage. Gère la logistique, les contacts et pourvoit les stagiaires en tout, même le café chaud.

Dîner. Joël est resté. On l’entoure. Le cours continue.

En soirée, projection d’une émission sur le travail spectaculaire de Jean-Luc Moreau et un magazine coloré et créatif sur « Les murs du monde » de Joël. Il est plus de 22H30, la discussion se poursuit après la projo. la nuit sera courte! » Demain  » Comment écrire?  »

 

 J+3 « Comment écrire en reportage ? » avec Jean-Paul Mari.

Rien de plus ardu, apparemment, que de transmettre les techniques d’écriture. Rien de plus angoissant que la page blanche qui peut handicaper le travail d’un reporter écrit, photo ou vidéo, pendant toute une vie professionnelle. On n’apprend pas à écrire comme un écrivain en une semaine, mais le stage a permis de découvrir qu’il n’existe pas une écriture, mais… des écritures. Adaptées à ce que nous voulons faire.

                                                  La forêt du domaine de l’Hermitage, où se déroule le stage ( Photo Patrick Bar)

D’où, au programme du matin, « Écrire, c’est brûler vif », une longue réflexion sur les origines de l’écriture, son exigence, les risques, l’engagement, sa fonction, le traitement, la forme de l’écriture pour l’investigation, le reportage, une légende photo, un synopsis ou un commentaire de documentaire. Le tout, complété par de rapides exercices d’écriture rapide, pour lever les blocages. Et certains découvrent, en quelques heures à peine, qu’ils sont …parfaitement capables d’écrire !

 

Travail d’exploration de l’écriture en reportage avec Jean-Paul Mari

Dans l’après-midi, une intervention d’Hervé Brusini, Président du Prix Albert Londres, sur les origines et le développement du grand-reportage et son application contemporaine.

Hervé Brusini, lors d’une remise du Prix Albert Londres

Après le déjeuner, des responsables deux responsables de Reporters Sans Frontières, Fanny Toubin et Arnaud Froger, responsable du Bureau Afrique de RSF sont venus informer les stagiaires de leur mission et de ce que l’organisation pouvait leur apporter comme aide directe – gilet de protection, casque, assurances – et en termes de sécurité, notamment sur le fléau des prises d’otages.

Patrick Bar, photographe et stagiaire.

La journée a aussi été ponctuée de documents filmés pour élargir la réflexion et s’intéresser à la crise actuelle en Ukraine. Un plan de projet de reportage sur la guerre en cours a permis d’explorer tous les aspects d’un éventuel reportage (écrit, photo, vidéo, angle, géographie, géopolitique, voyage, médias, routes d’accès, sécurité, communications, frais, vente )  Prêt à l’emploi !

Il était plus de 23 h quand la journée s’est achevée autour d’une bière.

Demain, petit-déjeuner à 9H00 et gros dossier : « L’image pour un grand-reporter »

Stage Grands-Reporters : J+4 «Comment filmer ?» avec Roger Motte.

Son message m’est parvenu dans la nuit, à 4H30 : « La guerre a commencé… » La conclusion est évidente, Dorothée Ollieric, grand-reporter à FR 2 ne pourra pas assurer son intervention au stage à l’Hermitage. Combien de débats, de spectacles, d’anniversaires ou de Noël avons-nous tous annulés au dernier moment en fonction de l’information ? Le grand-reportage, c’est cela aussi.

Évidemment, nous avions prévu ensemble un « plan B », qui a la qualité d’un « plan A », avec la venue de Roger Motte, grand-reporter d’images avec qui Dorothée a si souvent travaillé, Roger, que j’ai si souvent croisé sur le terrain, à Sarajevo ou ailleurs.

Roger, c’est du solide. Il arrive d’ailleurs avec plusieurs types de caméras dans ses valises, des plus anciens aux plus récentes, dont la dernière, grosse comme le pouce, qui permet de tourner même un documentaire. La journée commence par une démonstration pratique. Puis l’exploration de « l’Image pour un grand-reporter », format, matériel, approche, sécurité, spécificité.

Roger passe tout en revue : qu’est-ce qu’un plan, la caméra n’est pas une arme, elle ne protège pas, le contact humain, il montre des rushs, à Sarajevo, les décortique… Les stagiaires veulent tout savoir sur l’envers du décor.

Le temps file, mais on tient les horaires.

Déjà, après le déjeuner, l’heure est au reportage humanitaire. Et qui, mieux que Rony Brauman, brillant intellectuel et médecin, écrivain et ex-président de MSF, pourrait assurer ce module ? De l’histoire de l’humanitaire, à l’envergure actuelle, l’évolution, jusqu’aux polémiques sur son action, et surtout l’analyse des crises dans le monde, à travers l’action humanitaire au Biafra, en Haïti ou en Somalie, rien n’est oublié.

Un de nos stagiaires vient d’ailleurs de terminer un master en géopolitique sur l’humanitaire, il croyait avoir fait le tour du problème, mais découvre, fasciné, son application pratique sur le terrain.

Après le dîner, pour poursuivre dans le reportage humanitaire, on projette « Les migrants ne savent pas nager », reportage d’un mois à bord de l’Aquarius, bateau de sauvetage des migrants en Méditerranée, lors de sa première mission.

Clin d’œil. Sur le bateau, le photographe officiel et bénévole s’appelle Patrick Bar. Et il fait partie du stage, qu’il n’a pas hésité à rejoindre, pour pousser plus avant sa réflexion et son apprentissage du grand-reportage. Respect !

Avec tout cela, on ne dort pas beaucoup. Surtout quand on annonce aux stagiaires que l’article- exercice, sur le thème : une journée avec Joël Robine – qu’ils devaient rendre samedi, doit-être terminé et remis «  pour cause de bouclage avancé », demain matin… avant 9H00.

La nuit sera longue et blanche !

 

Stage Grands-Reporters : J+5 «Le reportage de guerre ?»

La guerre. Quelle guerre ? Drôle d’idée, non. J’avoue que nous n’avions pas prévu cette cinquième journée de stage en pensant que l’actualité nous rattraperait au galop militaire. Le reportage de guerre n’est pas tout le grand-reportage et toute la semaine, nous avons tout fait pour faire comprendre à nos stagiaires que le grand-reporter, s’il adore voyager pour voir le monde, c’est surtout pour aller vers l’autre.

Et malgré les tragédies qu’il rencontre et raconte, malgré la violence, la douleur et le désespoir des grands évènements, crises, catastrophes, guerres précisément, le grand-reporter a d’abord pour mission de raconter l’autre et de célébrer la vie.

 

La guerre, donc, ou plutôt les guerres. Ce serait trop simple d’avoir un modèle unique prêt à rapporter. La guerre civile, la guérilla, la guerre d’occupation, la guerre d’invasion, la guerre sur le front, la guerre asymétrique, le no man’s land, guerre et génocide…

nous avons tout passé en revue, en essayant à chaque fois de comprendre les différences donc les différentes manières d’y accéder, d’aller au cœur de l’action, de comprendre le contexte, de se mouvoir dans la guerre, d’en comprendre les raisons profondes et d’en saisir tous les symptômes.

Et surtout, de savoir « Comment faire ? », la méthode, guide-line de notre stage.

Juste après le petit-déjeuner, au programme donc, le décryptage d’une guerre, les particularités, la préparation, les risques et la prévention. Le tout à travers une panoplie de conflits, sur cartes à l’écran et dossier images, du Liban à Israël-Palestine, de l’Irak à la Bosnie, du Liberia au Mali, de l’Algérie au Rwanda.

Avec, bien sûr, une étude sérieuse de cette guerre qui se déroule là, sous nos yeux d’Européens. Et que deux de nos stagiaires, Olivier et Alexandre, se préparent à couvrir, en photo et en vidéo. Ils partiront dès la fin du stage, en début de semaine, le temps de s’équiper d’un appareil manquant, d’un gilet de combat, d’un casque et, aussi, d’une assurance.Et je croise les doigts en espérant que cette semaine leur permettra de remplir leurs objectifs.

Ils savent bien que, comme avec tous les stagiaires, nous resterons à leurs côtés, pour une information, un conseil, un numéro utile, une direction de reportage.

 

Puis un déjeuner, copieux, mais rapide. Et un très gros morceau au programme : le trauma psychique de guerre. Quelle est cette chose qui peut toucher tout le monde, soldats, reporters, humanitaires ou civils, et qui existe depuis la nuit des temps de la guerre ? Quelle est cette chose qui nous tue, sans blessures apparentes ? Comment reconnaître la Névrose traumatique, PTSD pour les anglo-saxons, tenter de s’en prémunir, s’en guérir ?

D’abord, projection du documentaire « Sans blessures apparentes » précisément qui, à travers des témoignages et le décryptage d’un psy militaire permet d’approcher le sujet. C’est dur, c’est fort, c’est dérangeant. Les stagiaires sont un peu sonnés. Débat et questions.

Benoît Heimermann

Il est temps de souffler. Au programme, « Le grand reportage et le sport » avec un artiste en la matière, Benoît Heimmerman, trente ans d’Équipe Magazine, des centaines de reportages à travers la planète sport, des livres et des documentaires passionnants comme « l’Odyssée des jeux olympiques » que les stagiaires dévorent.

Il fait nuit. Pas de dîner prévu au salon ce soir mais un immense feu de bois à ciel ouvert, avec brochettes sur le grill. Il est temps de décompresser. Et d’échanger entre stagiaires sur cette semaine de travail au long cours.

Ce n’est pas fini. Demain, Brunch et débriefing personnalisé.

 

Stage Grands-Reporters : J+6 . Le dernier jour.

Hier soir, le barbecue au coin du feu , au cœur de la forêt de l’Hermitage, s’est terminé tard dans la nuit. L’occasion, évidemment, de parler reportage. Olivier et Alexandre partent dès le début de la semaine prochaine vers l’Ukraine en guerre.

Au matin, brunch tardif, le temps de dormir un peu. Puis débriefing de chaque stagiaire. On compare les résultats entre les objectifs que chacun voulait atteindre en commençant le stage et ce qu’ils ont vraiment appris. Et là, surprise!

Sur les huit stagiaires, tous affirment avoir atteint pleinement tous leurs objectifs? Pardon? Je fais répéter, relis le débriefing à leur arrivée. Ils confirment. Trois d’entre eux disent même que le stage est allé au delà de leurs espérances.

L’un s’est débloqué au niveau de l’écriture, le deuxième a trouvé les réponses nécessaires à son prochain reportage,le troisième, l’autre a décidé de changer de métier pour devenir reporter et écrire, le quatrième a eu la réponse qu’il souhaitait sur son projet professionnel…On n’en espérait pas tant!

Une semaine, c’est court mais quelle est intense, le travail paie.

Et il va continuer. Nous allons suivre tous les stagiaires, contacts, conseils, projets, pour les aider à aller vers leur but. Vivre de ce métier de grand-reporter. Et pour commencer, accompagner Olivier qui va monter à bord d’un convoi humanitaire parti de Marseille vers Lviv en Ukraine. Et Alexandre, qui met au point son matériel photo pour filer au plus près de la guerre, vers Kiev.

Quelque part, le stage continue à vivre.

 

Les stagiaires en fin de semaine. Deux d’entre sont partis aussitôt vers l’Ukraine

( Olivier, à gauche, et Alexandre sixième en partant de la gauche)

 

 

PS : Et à bientôt pour un autre stage à l’automne. Face au succès de celui-ci, et aux demandes d’inscription qui n’ont pu être satisfaites,  nous voilà obligés de répéter l’expérience. Nous communiquerons les dates dès que possible.

 

 

 


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