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Télé-réalité et bureau ovale : le très mauvais show de Donald Trump

publié le 23/05/2025 par Pierre Haski

Après Zelensky, c’est le président sud-africain Cyril Ramaphosa qui a fait les frais du théâtre de la cruauté organisé par Donald Trump dans le bureau ovale de la Maison Blanche.

Que cherche le président américain en humiliant ses visiteurs ? Il organise la mise en scène de sa propre gloire.

« C’est de la bonne télé », s’était exclamé Donald Trump à l’issue de sa rencontre avec Volodymyr Zelensky, qui s’était transformée en séance d’humiliation du président ukrainien. De fait, le bureau ovale, dans la West Wing de la Maison Blanche, est devenu, depuis quatre mois, un studio de télé-réalité, dans lequel la « vérité alternative » chère au président américain l’emporte sur les faits.

Le dernier à en avoir fait les frais, c’est Cyril Ramaphosa, le président de l’Afrique du Sud, venu tenter de raccommoder des relations abimées avec l’administration Trump. Il est tombé dans un guet-apens, c’est le mot de la presse américaine, avec une mise en scène signée Donald Trump, un théâtre de la cruauté télévisée.

Le président a même diffusé à son hôte un film mettant en cause un soi-disant « génocide » des fermiers blancs en Afrique du Sud. Le « New York Times » a analysé ce film et prouvé qu’il était truffé de mensonges. Il y a bien des fermiers blancs assassinés, mais le taux de criminalité très élevé touche tous les groupes de population, et il est absurde de parler de génocide ou même d’apartheid à rebours.

Donald Trump est un homme de l’image

Il a eu autrefois son propre reality show, The Apprentice, avec sa célèbre réplique « you’re fired » pour éliminer un candidat. Une expérience qu’il met au service de son pouvoir et de sa communication.

Il dispose du plus célèbre studio au monde, le bureau ovale, que l’on a vu dans tant de séries et de films qu’on ressent un sentiment de familiarité quand on y pénètre pour la première fois, comme ça m’est arrivé en février dernier lors de la visite d’Emmanuel Macron.

Donald Trump ouvre presque chaque jour le bureau ovale à des journalistes triés sur le volet – l’agence américaine Associated Press en a été exclue pour avoir refusé de débaptiser le Golfe du Mexique en Golfe de l’Amérique. Il y signe ses décrets, les fameux Executive Orders, et reçoit les visiteurs étrangers. C’est lui qui distribue la parole pour les questions, il est le metteur en scène et acteur principal d’un show à sa propre gloire.

L’expérience montre que Trump est fort avec les faibles, ou ceux qu’il juge comme tels, et faible avec les forts. A Zelensky, il a dit qu’il n’avait « pas les cartes en mains », et s’est autorisé à l’humilier ; quant au visiteur sud-africain, il a déjà perdu toute l’aide américaine sous l’influence des ex-Sud-Africains, Elon Musk ou l’autre puissant patron de la Tech, Peter Thiel.

A l’opposé, il a laissé Emmanuel Macron le contredire sur l’aide européenne à l’Ukraine car le président français a appris à traiter avec lui depuis le premier mandat. Et Donald Trump était encore sous le souvenir ému de l’inauguration de Notre Dame !

La principale victime, ce sont les faits. Cyril Ramaphosa n’a pas pu rétablir la vérité sur la situation certes difficile de son pays, mais qui n’a rien à voir avec la caricature qu’en donne Donald Trump. Et Emmanuel Macron s’est vu répondre à propos de l’Ukraine : « si ça te fait plaisir de croire ça »… sur l’air de « on ne me la fait pas »…

Une fois qu’on a survécu à la télé réalité du bureau ovale, la négociation peut commencer : c’est la règle du jeu diplomatique dans la première puissance mondiale en 2025, il faut le savoir.


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