Ukraine : l’été de tous les dangers
50 000 soldats russes se préparent à une offensive d’été

La Russie a procédé à son bombardement de missiles et de drones le plus massif depuis son invasion de l’Ukraine. Et elle prépare son offensive d’été, alors que Donald Trump reste ambivalent sur la suite de son aide militaire, une fois les contrats signés par Joe Biden épuisés au cours de l’été.
Attention, une guerre peut en cacher une autre. Au cours des dernières semaines, alors que tous les regards étaient dirigés vers les conflits du Moyen Orient, la guerre ne baissait pas d’intensité en Ukraine.
Rien que le weekend dernier, la Russie a mené son bombardement aérien le plus intense depuis son invasion de l’Ukraine il y a plus de trois ans : une pluie de 537 drones, missiles et autres engins explosifs s’est abattue sur le pays en quelques heures. La défense anti-aérienne en a détruit la moitié, les autres se sont abattus sur les villes ukrainiennes, y compris la capitale, Kiev, où la population a passé des heures dans les abris et dans le métro sous-terrain. En juin, le rythme des attaques de drones et de missiles a été trois fois celui de l’an dernier.
Ce weekend, également, l’Ukraine a perdu un de ses avions de chasse F-16 et le pilote a trouvé la mort en voulant éviter de s’écraser sur une zone habitée après avoir été touché. Mais le plus inquiétant pour les Ukrainiens, c’est l’offensive russe d’été qui se prépare.
L’Ukraine estime que quelque 50 000 soldats russes sont massés à une vingtaine de kilomètres de Sumy, une capitale régionale du Nord, désormais menacée. Les Ukrainiens se battent à un contre trois : malgré des pertes considérables, la Russie dispose d’une réserve humaine bien plus vaste que celle de l’Ukraine.
Chaque année, à cette saison, les offensives reprennent, mais cette année c’est clairement l’Ukraine qui est sur la défensive. Elle compense son infériorité numérique par son inventivité, comme les opérations de drone en profondeur en Russie de ces derniers mois.
Aucun expert ne redoute un effondrement militaire de Kiev, mais, visiblement, la stratégie russe est d’épuiser l’armée ukrainienne et d’affaiblir ses stocks d’armes et de munitions, son point faible. C’est là que le contexte diplomatique intervient : il conditionne les livraisons d’armes, et le soutien financier et politique qui ont permis à l’Ukraine et à son armée de tenir depuis trois ans.
Depuis l’entrée de Donald Trump à la Maison Blanche, il y a cinq mois, la politique américaine vis-à-vis de l’Ukraine est soumise à l’humeur du président. Exécrable, lors de la séance humiliante du Bureau ovale avec Volodymyr Zelensky en février ; mais la semaine dernière à La Haye, en marge du Sommet de l’OTAN, Donald Trump a revu Zelensky et a déclaré qu’il « n’aurait pas pu être plus agréable ».
Cette inconstance du président américain est devenue une arme pour Vladimir Poutine. Trump honore pour l’instant les engagements de livraisons d’armes qui remontent à son prédécesseur Joe Biden, mais ces contrats s’achèvent dans le courant de l’été et le président américain reste flou sur la suite. Il semble ouvert à des livraisons de batteries de missiles antiaériens Patriot. Mais, surtout, il ménage Poutine, pourtant responsable de son échec à stopper cette guerre comme il l’avait promis : le président russe profite de cette ambivalence pour appuyer son avantage.
Les Européens s’apprêtent à décider d’un 18ème paquet de sanctions contre la Russie, l’un des plus sévères, expliquent les diplomates. Et ils réaffirment autant qu’ils peuvent leur soutien à l’Ukraine. Mais ils semblent incapables de faire pencher la balance de manière décisive sans les Américains. L’été sera long et difficile pour les Ukrainiens, qui tiennent envers et contre tout sur cette ligne de front du chaos du monde.
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