1/ Islande. Katrín Jakobsdóttir: un bon gauche, oui mais pas seulement…
L’ancienne Première ministre islandaise est un modèle pour les sympathisants d’une gauche sociale, féministe et écologiste en Europe.

Katrín Jakobsdóttir -D.R
Série sur les femmes remarquables
Avec son sourire éclatant, ses yeux bleus et ses mèches brunes bien sages, son air aimable, son caractère enjoué et son sens de l’humour ne doivent surtout pas être pris pour de la faiblesse. Si Katrín Jakobsdóttir a dirigé le gouvernement de son pays de décembre 2017 à avril 2024 avec un programme et des réalisations qui feraient pâlir de jalousie tous les partis de la gauche écologiste en Europe, elle le doit à son style consensuel, mais aussi à son habileté et à la force de ses convictions.
Elle a en effet dirigé une alliance gauche-droite composée de son propre parti (gauche-verts), de l’Alliance sociale-démocrate, du Parti de l’Indépendance (conservateur) et du Parti du progrès (centre-droit). Sa réputation de rectitude et d’intégrité, à 48 ans, a séduit bien au-delà de ses partisans. En 2017, un sondage révélait que 60 % des Islandais souhaitaient qu’elle conserve son poste de cheffe du gouvernement, alors que son parti ne recueillait que 12,6 % des suffrages.
Elle a été la première écologiste au monde à diriger un gouvernement. C’est aussi une féministe convaincue, dotée d’un fort sens social. Au pouvoir, elle a rendu l’impôt plus progressif, développé le logement social, étendu le congé parental (six mois pour les hommes, six mois pour les femmes) et réduit les inégalités salariales entre hommes et femmes. Elle est également à l’origine du premier congrès international sur le harcèlement et les violences faites aux femmes, qui s’est tenu à Reykjavik en septembre 2019, illustrant l’avance des pays nordiques sur le sujet. Angela Davis y a participé.
La Première ministre et son gouvernement ont géré admirablement la crise du Covid : l’Islande n’a compté que 33 morts, ce qui est remarquable, même pour un pays de 400 000 habitants. Bien sûr, elle n’a pas atteint tous ses objectifs : elle n’est pas parvenue à faire sortir l’Islande de l’OTAN, ni à créer un parc national au centre de l’île. Elle a été battue au printemps 2024 lors de l’élection présidentielle.
Katrín Jakobsdóttir, issue d’une famille d’universitaires et de parlementaires, est mariée et mère de trois fils. Titulaire de diplômes universitaires en français et en islandais, cette littéraire n’a jamais caché sa passion pour les romans policiers. « C’est comme une thérapie à la fin de la journée », avoue-t-elle. Elle a d’ailleurs consacré sa thèse à Arnaldur Indriðason, l’une des grandes stars du roman noir nordique.
Mais elle a fait bien pire : avec l’auteur Ragnar Jónasson, qui est aussi un de ses amis, elle a écrit « Reykjavik« , un polar, bien sûr, où il est question de jeune fille disparue, d’hommes de pouvoir qui se croient invulnérables, et d’une héroïne, Sunna, qui va les défier. La Première ministre l’a écrit pendant la crise du Covid pour « penser à autre chose que son travail ». Venue présenter son livre à Paris, cette « femme d’État » normale prend le métro et fait ses courses au supermarché, comme chez elle. Moqueuse, elle commente : « Ne le dites pas au Quai d’Orsay. »
Voir le roman Reykjavik
A suivre…
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