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Coup de colère : Jean Malaurie, le Groenland et Donald Trump.

Edito publié le 05/11/2019 | par grands-reporters

Jean Malaurie, seul Ambassadeur pour l’Arctique à l’Unesco (Nature et Culture) et grande médaille d’or du Parlement groenlandais, est scandalisé par l’esprit colonial de l’offre de rachat du Groenland au Danemark par le Président des États Unis Donald Trump.

J’apporte donc mon total soutien au Ministre des Affaires étrangères groenlandais, Ane Lone Bagger, qui affirme fortement que « la grande ile est ouverte au commerce mais n’est pas à vendre ». D’autant que les groenlandais ont signé un « accord constitutionnel » avec le gouvernement danois.

La proposition de Donald Trump est d’autant plus irrecevable que le Groenland est un territoire d’outre-mer danois associé à l’Union Européenne. Le sort du Groenland relève donc également de l’Union Européenne.

Cette déclaration est d’autant plus choquante que les États unis ont un lourd passif avec le Groenland.

En Juin 1951, était créée sans l’autorisation de la population locale la base militaire américaine de Thulé pour avions porteur de bombes nucléaires dont j’ai été témoin. Nommé peu après conseiller du Gouvernement danois, j‘avais recommandé qu’aucun avion américain porteur de bombes nucléaires ne puisse se poser à Thulé. Le risque n’était pas mince : le 21 janvier 1968, un bombardier Us s’abimait en effet aux abords de Thulé avec quatre bombes nucléaires. Une d’entre elles est toujours disparue en mer

Deux ans plus tard et malgré ce désastre, une base secrète était construite à 200 kms au sud de Thulé dite Camp Century sous couvert de recherches sur le climat. 700 ogives nucléaires environ y ont été entreposées puis retirées. Les substances nocives de type radioactif sont restées. Washington se refuse de les nettoyer.

Il faut savoir que du fait du réchauffement accéléré, cette pollution risque d’atteindre la mer de Baffin et les grandes ressources poissonnières de l’Atlantique nord.

Si les États unis veulent faire un chèque, ce serait un premier acompte pour commencer à s’acquitter de la dette environnementale qu’ils ont contracté vis à vis des groenlandais, du Danemark, de l’Union Européenne et du bien commun.

L’offre cyniquement mercantile de Donald Trump semble oublier que les États Unis se sont forgés comme nation dans la lutte anticoloniale. Et que l’on ne gomme pas près de trois siècles d’histoire dano-groenlandaise avec des valises de dollars. Je demande à la Directrice Générale de l’Unesco Audrey Azoulay d’apporter la réponse appropriée.

Jean Malaurie, Directeur du Centre d’études arctiques CNRS/EHESS. Paris.

Tel : 02 32 90 17 51

 

 


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