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Fou d’Amérique

publié le 09/02/2025 par Jean-Paul Mari

Moins gracieux que le Fou de Bassan mais nettement plus dangereux, une nouvelle espèce est née…

Le problème avec les grands acteurs n’est pas leur performance sur scène. Regardez Donald Trump. Tantôt bouche en cœur, lèvres ourlées comme pour embrasser la foule, tantôt le regard menaçant, yeux durs, front plissé, exprimant la puissance – il adore ! – comme sur sa photo officielle digne d’une série ; tantôt la tête rejetée en arrière, dodelinante, bras écartés, sourire extatique quand il parle de l’Amérique, c’est-à-dire de lui, façon évangélique protestant qui regarderait son ego s’envoler vers le ciel.

Non, le problème n’est pas le jeu du comédien. Il provient du fait que Trump… ne joue pas. Comme ces acteurs de Psycho ou de Hannibal qui en arrivent à se fondre si bien dans leur rôle qu’ils deviennent leur personnage. Docteur Donald et Mister Trump. Toutes ses mimiques, ses envolées, ses grimaces, ses rictus, ses tics… si elles étaient examinées par une commission de psychiatres, l’enverraient sans doute directement en consultation avec une dose de sédatifs. Mais aujourd’hui, c’est Trump qui a le pouvoir d’envoyer devant un tribunal pour « atteinte terroriste à l’autorité de l’État ». Ne souriez pas. Cela vient.

Le problème avec les autocrates, est qu’ils disent ce qu’ils font et qu’ils font ce qu’ils disent. Dès son arrivée à la Maison-Blanche, Trump a signé une rafale de décrets. En voici quelques-uns : retrait des États-Unis de l’Accord de Paris sur le climat, fin des programmes de diversité, équité et inclusion (DEI) au sein du gouvernement fédéral, interdiction du financement fédéral des ONG internationales qui pratiquent ou promeuvent l’avortement, révocation des sanctions contre les colonies israéliennes, pardon des émeutiers du 6 janvier 2021, retrait des États-Unis de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), réintégration des militaires refusant la vaccination contre la COVID-19, etc.

Il s’agit du sort de l’Amérique et d’une partie du monde. Israël, par exemple. Regardez la photo Trump-Netanyahou face à la presse lors de leur rencontre à Washington : Trump propose d’expulser les Palestiniens de Gaza vers… ailleurs. Et le promoteur immobilier ,qui ne s’est jamais endormi en lui, veut – à la place des ruines laissées par les bombardements – transformer la bande de Gaza en riviera de Floride. En 1945, il aurait sûrement proposé de transformer le Reichstag dévasté en un Club Méditerranée. À côté de lui, Netanyahou a le regard incrédule et émerveillé d’un gosse devant le sapin de Noël, celui du môme qui a demandé un camion de pompiers et se voit offrir toute la caserne.

Le problème avec les apprentis dictateurs qui prennent le pouvoir est qu’ils font tout pour ne plus jamais le quitter. Ils arrivent par les urnes mais ne pensent plus qu’à les casser ici à coups de batte de baseball. Adolf Hitler devient chancelier en 1933, Poutine a été élu en mars 2000, les mollahs d’Iran sont là depuis 45 ans, Morsi a été renversé alors qu’il était sur le point de changer la Constitution égyptienne, Maduro, au Venezuela, gagne systématiquement depuis 2013 toutes les élections qu’il perd… L’objectif n’étant pas seulement de garder le pouvoir, mais aussi de changer la nature de la population ainsi gouvernée, jusqu’à ce que les peuples eux-mêmes, soumis et décérébrés, finissent par plébisciter le dictateur qui les opprime.


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