Transfert des cendres de Pierre Savorgnan de Brazza à Brazzaville
La République du Congo vient de transférer les cendres de son fondateur, Pierre Savorgnan de Brazza, à l’occasion du centenaire de sa mort.
Avec l’accord de la famille en Italie et en France de l’explorateur français, et en fait à leur initiative, son corps ainsi que ceux de sa femme et de leurs quatre enfants ont été rapatriés au Congo depuis le cimetière d’Alger où ils se trouvaient, jusqu’au mausolée spécialement achevé dans le centre historique de Brazzaville.
Il est étonnant qu’un pays vénère son colonisateur. Savorgnan de Brazza était un humaniste éminemment respectable et sa mort suspecte, est attribuée à la vengeance du lobby colonial, après avoir effectué une inspection au Congo qui l’avait révolté contre le comportement des colons et des sociétés concessionnaires qui exploitaient économiquement le pays.
Il s’intéressa spontanément aux peuples qu’il rencontrait et les traita avec respect, libérant sur son passage les esclaves, ce qui lui valut le nom de « Père des esclaves »
Il signa le 10 septembre 1880 un traité d’amitié avec le roi Makoko des Tékés qu’il était allé visiter chez lui, et qui est toujours respecté aujourd’hui ! C’est le traité d’alliance historique entre le Congo et la France. Makoko Iloo Premier préféra s’allier à la puissance qui le protégerait de l’appétit féroce de Stanley, activement occupé à mettre le Congo rive gauche à feu et à sang pour le compte du Roi des Belges. Le Français avait la réputation de respecter les indigènes, de libérer les esclaves et d’éviter de faire couler le sang. Il était précédé par sa réputation, si bien que le Roi envoya des émissaires pour le guider vers lui. On fit une grande cérémonie et on creusa un trou dans le sol où Brazza enterra les cartouches de sa Winchester et on planta un arbre dessus. Les chefs tribaux s’inquiétaient de savoir comment ce traité allait les protéger. Brazza leur distribua des drapeaux tricolores et leur conseilla de les dresser sur leurs villages. Ainsi, Stanley sut que ces territoires n’étaient plus à prendre, et la protection promise fut effective ! Le traité signé par le vieux Roi fut péniblement ratifié plus tard par le parlement français.
Le mausolée de Brazza est situé au centre historique de Brazzaville. Il comporte en plus de la salle funéraire où ont été déposés les six cercueils, les bureaux de la fondation, une bibliothèque et un musée. Il a coûté 15 M d’€ payés par le Gabon, le Congo et la France.
Les cérémonies ont eut lieu du 30 septembre au 3 Octobre, en présence du Pdt Sassou Nguesso, du Pdt Omar Bongo (qui est aussi Téké). Savorgnan partit du Gabon pour découvrir le Congo et fonda Francheville (Ville franche d’esclave, aujourd’hui Franceville) .
L’avion funéraire a survolé le trajet de l’expédition qui découvrit le Congo.
Pierre Savorgnan de Brazza vient d’une très vielle famille italienne, de la région du Frioul, dans le village de Brazzacco. Ses origines viennent de l’empereur romain Justinien d’une part et des Doges vénitiens d’autre part. Le château de Brazzacco est en ruine depuis une jacquerie du moyen âge, mais la maison de style néo-palatine est magnifique. La petite chapelle du domaine est dédiée à saint Léonardo, patron des prisonniers. Ainsi le jeune Pietro fut-il sensible très tôt au sort des esclaves !
La demeure fut occupée pendant la guerre 39-45 par les Allemands et les Autrichiens puis les Britanniques, mais c’est un soldat autrichien ivre qui déclencha l’incendie qui détruisit la plus grande partie des objets ayant appartenu à Savorgnan. Le reste était préservé dans un musée à Alger où sa veuve avait demandé à l’inhumer en terre d’Afrique, après avoir refusé le Panthéon et les Invalides.
Sa rencontre fortuite avec un Amiral français de passage à Rome qui se pris d’amitié pour le jeune homme lui ouvrit les portes de l’Ecole de Navale à titre étranger. Mais pour commander un navire et partir en mission, il dut obtenir la nationalité française et refaire l’Ecole Navale à un grade inférieur. L’Italie n’offrait aucune perspective au jeune aventurier et la France était à son apogée ! A 23 ans, il partit pour sa première mission de chasse aux navires négriers dans la baie de Libreville (Ville libre, les esclaves, toujours). Il obtient l’autorisation de remonter le fleuve et fonda Franche Ville (aujourd’hui Franceville, où l’avion qui ramena ses cendres fit une escale émouvante avec honneurs militaires et populaires)
C’est de là qu’il partit à la recherche du grand fleuve Congo encore inconnu, mais que son concurrent et contraire Joseph Stanley découvrit quelques semaines avant lui.
C’est l’occasion de faire un portrait posthume de ce personnage aujourd’hui méconnu mais qui fut extrêmement populaire en son temps et qui ne transigea jamais avec son honneur et l’idée qu’il se faisait de la dignité humaine : Il était un précurseur. Pour lui, l’Honneur de la Patrie était dans la défense des valeurs humanistes et morales, sans considération de la couleur de la peau ou de l’origine raciale.
Patrick Robert
Courbevoie le 5 octobre 2006
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