L’ÉDITO: » MSF bombardé…Paris se tait. », par Luc Mathieu.
Médecins sans frontières, fondée par des Français en 1971, a reçu le prix Nobel de la paix en 1999. Samedi, son hôpital de Kunduz, une ville du nord de l’Afghanistan, a été bombardé par l’armée américaine. Douze employés et sept patients ont été tués. L’ONU évoque un possible crime de guerre. L’armée américaine livre des récits contradictoires, alternant entre «dommage collatéral» et ciblage «par erreur». Les autorités françaises, elles, restent silencieuses.
Ni François Hollande, ni Manuel Valls, ni la classe politique n’ont réagi. Ils n’ont rien condamné, rien demandé. Seul le Quai d’Orsay a publié un communiqué de cinq lignes pour souhaiter que «toute la lumière soit faite sur ce drame».
Ce silence est aussi lâche que dangereux.
MSF ne travaillait pas en secret à Kunduz, son hôpital aujourd’hui ravagé était connu, de l’armée américaine. Au regard de la Convention de Genève, ses équipes et ses patients, civils ou non, devaient être protégés. Que la France ne le rappelle pas affaiblit encore un peu plus le droit humanitaire international.
Face à l’un des pires drames qui l’ait frappée en plus de quarante ans, MSF demande une enquête internationale indépendante. Cela relève du bon sens. Le moins que l’on aurait pu attendre des autorités françaises, mais aussi européennes, eût été qu’elles appuient cette requête.
Leur silence masque mal leur embarras. Paris veut-il éviter de froisser son allié américain et oublier l’Afghanistan? Peut-être. Mais la guerre n’est pas finie. En six ans, elle a fait près de 5 000 victimes civiles. A Kunduz, MSF a évacué son hôpital. C’était le seul de la région capable de soigner des grands blessés.
L.M
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