Gaza : quand Trump tord le bras à Netanyahou
, Donald Trump a imposé à Benjamin Netanyahou l’acceptation d’un plan de paix négocié avec le Qatar, l’Égypte et l’Arabie saoudite. Une rencontre qui ouvre une nouvelle bataille politique pour l’avenir du territoire palestinien
Netanyahou s’est fait tordre le bras par la Maison-Blanche
La rencontre du lundi 29 septembre 2025 entre Donald Trump et Benjamin Netanyahou à la Maison-Blanche a marqué, de fait, la fin de la guerre déclenchée par le Hamas le 7 octobre 2023. Le Premier ministre israélien s’était pourtant autorisé, quelques jours auparavant, à justifier la poursuite des opérations militaires à Gaza dans un discours vindicatif et guerrier à la tribune de l’ONU. Il pensait encore pouvoir dénaturer et désarmer le plan de paix en vingt points négocié par les États-Unis avec le Qatar, l’Égypte et les autres pays arabes médiateurs. À l’évidence, il n’avait pas compris alors que Donald Trump avait changé de camp.
Pressions arabes
Chacun à sa manière, l’Arabie saoudite, le Qatar et les autres pays arabes impliqués ont fait comprendre à la fois au Hamas et au président américain que ce conflit n’avait que trop duré. L’ampleur de la catastrophe humanitaire à Gaza, documentée par l’ONU, a fini par être source de tensions politiques et de colère dans plusieurs capitales arabes. Donald Trump, soucieux de préserver les contrats énergétiques et d’armement promis par Riyad, a lui aussi compris qu’il ne pourrait engranger les bénéfices diplomatiques et économiques attendus tant que la guerre se poursuivait.
N’ayant pas digéré le bombardement israélien sur le territoire du Qatar en août 2025, il s’est permis d’humilier Benjamin Netanyahou en le forçant à s’excuser publiquement auprès du Premier ministre du Qatar, Mohammed ben Abdulrahman Al Thani, lors d’un échange retransmis en direct depuis le Bureau ovale. Netanyahou a également été contraint de promettre de ne jamais renouveler ce type d’incident.
Une volte-face imposée
Netanyahou s’est donc vu obligé, à la Maison-Blanche, de dire le contraire de ce qu’il avait déclaré à l’ONU quelques jours auparavant. En acceptant le plan de paix américain, il tablait sur des tergiversations du Hamas pour retarder la libération des otages et avait promis à ses alliés d’extrême droite que la campagne militaire continuerait sur la ville de Gaza. Mais la séquence d’événements qui a suivi a été rapide et n’a pas laissé le choix au Premier ministre israélien.
Le Qatar et la Turquie ont tenu les promesses faites à Washington : les pressions exercées sur le Hamas ont porté leurs fruits. Contre l’avis des chefs militaires encore présents dans la bande de Gaza, la direction politique du Hamas, depuis Doha, a choisi sa survie et accepté la libération complète des otages israéliens, vivants ou morts, encore détenus. Dans la foulée, Donald Trump a intimé à Israël de cesser les hostilités sur le terrain, une instruction confirmée le lendemain par le Pentagone et relayée par le Département d’État.
Faire marche arrière ?
Les deux belligérants peuvent encore formuler réserves et conditions, mais la dynamique est lancée. Ni le Hamas ni le gouvernement Netanyahou ne peuvent désormais faire machine arrière. L’heure est venue des négociations et de la mise en place concrète et progressive du plan de paix préparé par l’administration américaine, avec le soutien de l’Arabie saoudite, du Qatar et de l’Égypte. C’est Khalil El Khaya, survivant du bombardement de Doha, qui conduira les discussions pour le Hamas. En attendant, Tsahal a réduit ses opérations de terrain dans la ville de Gaza et s’est repliée sur des positions défensives à l’ouest du fleuve Salah al-Din, selon des sources militaires israéliennes citées par Haaretz et Reuters.
La libération de Marwan Barghouti ?
Dès lundi 6 octobre, les négociations techniques sur la libération des otages doivent s’ouvrir au Caire, sous médiation égyptienne. Les émissaires américains attendent une négociation courte et une libération complète des otages au plus tard 72 heures après la signature d’un accord, selon The Guardian. Mais le Hamas laisse déjà filtrer qu’il exigera, en contrepartie, la libération de Marwan Barghouti,
Tous les otages devraient ainsi être libérés alors que Tsahal contrôle encore environ 70 % du territoire de la bande de Gaza, d’après une estimation du Washington Post. À la suite de cette libération, des pourparlers sur un cessez-le-feu durable seront engagés. Le Hamas continue d’exiger un retrait total des troupes israéliennes, mais ni Washington ni ses partenaires arabes ne sont prêts à accepter que le mouvement islamiste profite d’une trêve pour reconstituer ses capacités militaires.
Tous les observateurs s’accordent sur le fait qu’Israël sera contraint d’accepter un retrait partiel par rapport aux positions actuellement occupées — un compromis qui soulagerait l’état-major de Tsahal, inquiet des pertes et de l’allongement de ses lignes de défense.
Les obstacles du plan de paix
Le plan de paix en vingt points préparé par les États-Unis et leurs partenaires arabes se veut progressif et pragmatique. Les premières mesures, portant sur la libération des otages et l’arrêt des hostilités à Gaza-Ville, sont déjà en passe d’être réalisées. Mais une fois un cessez-le-feu stabilisé, il restera à déterminer comment mettre en œuvre les autres dispositions du plan, notamment celles relatives à la gouvernance de Gaza et au rôle futur de l’Autorité palestinienne.
Benjamin Netanyahou et ses alliés de la droite religieuse continuent de refuser l’émergence d’une autorité palestinienne unifiée. De son côté, le Hamas s’oppose à la mise en place d’une force d’interposition égyptienne financée par l’Arabie saoudite, craignant une marginalisation politique.
La fin d’une guerre, pas du conflit
Il est probable que Netanyahou cherchera à capitaliser sur le soulagement temporaire de l’opinion israélienne, conjugué au maintien d’un haut niveau d’alerte sécuritaire, pour convoquer des élections au moment jugé le plus favorable. Une campagne électorale lui permettrait de repousser les échéances liées aux engagements pris dans le cadre du plan américain sur le futur de Gaza.
Au-delà des succès initiaux, les initiateurs de ce plan de paix devront encore prouver qu’ils peuvent créer les conditions d’une solution politique viable et durable entre Israël et les Palestiniens. La séquence ouverte le 29 septembre à la Maison-Blanche marque peut-être la fin d’une guerre, mais pas encore la fin du conflit.
Encadré
Marwan Barghouti, le prisonnier politique le plus influent de Palestine

Chef historique du Fatah et figure de la deuxième Intifada, Marwan Barghouti purge depuis 2002 plusieurs peines de réclusion à perpétuité dans une prison israélienne. Condamné pour son rôle dans des attaques contre des civils pendant le soulèvement palestinien, il demeure, malgré son incarcération, l’une des figures les plus populaires de la scène politique palestinienne.
Considéré par une partie du Fatah et même par certains diplomates occidentaux comme un possible successeur légitime de Mahmoud Abbas, son nom revient régulièrement dans les négociations d’échanges de prisonniers. Sa libération, réclamée aujourd’hui par le Hamas, serait un geste hautement symbolique susceptible de rebattre les cartes politiques à Ramallah comme à Gaza.

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