Russie/Ukraine : l’enfer des soldats ukrainiens
Tortures systématique, mauvais traitements, des milliers de disparus, les Russes font subir l’enfer aux combattants et aux civils qui tombent entre leurs mains

Intitulé « Un silence assourdissant. Détention au secret, disparitions forcées et torture en captivité pour les Ukrainiens aux mains de la Russie », le rapport d’Amnesty International, publié le 4 mars dernier, révèle que :
« La détention au secret systématique des prisonniers de guerre et des civils ukrainiens par la Russie témoigne d’une politique délibérée visant à les déshumaniser et à les réduire au silence, plongeant leurs familles dans l’angoisse, dans l’attente de nouvelles de leurs proches », affirme le rapport. « La torture est pratiquée dans un isolement total vis-à-vis du monde extérieur, les victimes étant entièrement à la merci de leurs geôliers pour survivre. Il ne s’agit pas d’une série d’actes isolés, mais d’une politique systématique qui piétine tous les principes du droit international. »
104 personnes ont été interrogées: cinq anciens prisonniers de guerre ukrainiens, les membres des familles de 38 prisonniers de guerre, les proches de 23 Ukrainiens « portés disparus dans des circonstances spéciales », 28 civils anciennement détenus et leurs familles, ainsi que 10 prisonniers de guerre russes actuellement détenus en Ukraine.
« Ce trou noir, cette incertitude, cela me tue »
Si leur nombre exact reste inconnu, il est probable que des milliers d’Ukrainiens, militaires ou civils, soient actuellement en captivité en Russie et dans les territoires occupés.
La majorité des prisonniers de guerre ukrainiens sont détenus au secret, leurs familles recevant peu ou pas d’informations sur leur sort ou leur lieu de détention. Le mari d’Olena Kolesnyk, Serhii, a été capturé en juillet 2024. Elle dispose de très peu d’informations sur son sort, ces dernières n’étant ni officielles ni confirmées : « Je ne saurais pas où chercher mon époux ni où lui écrire. Ce trou noir, cette incertitude, cela me tue » .
« Ils ont commencé à me torturer tout de suite. Ils m’ont frappé à coups de pistolets paralysants, ces matraques spéciales, c’était très douloureux. J’ai vu que des gars commençaient à mourir après ça. Leur cœur ne le supportait plus. »
Volodymyr Shevtchenko, un ancien prisonnier de guerre ukrainien »

Prisonniers ? Morts ? Blessés ? Personne ne sait…
Des dizaines de milliers d’Ukrainiens sont considérés comme « disparus dans des circonstances spéciales » par les autorités ukrainiennes. Beaucoup se trouvent probablement en détention, d’autres ont été tués.
Volodymyr, le mari de Khrystyna Makartchouk, est apparu à la télévision russe racontant comment il avait été capturé. Un autre prisonnier de guerre rentré en Ukraine, qui le connaissait personnellement, a confirmé à sa famille qu’il était bien détenu. Pourtant, la Russie refuse de reconnaître officiellement sa captivité. Les civils constituent une grande partie des personnes victimes de disparitions forcées.
Torture systématique
« Ils ont commencé à me torturer immédiatement. Ils m’ont frappé avec des pistolets paralysants et des matraques spéciales, c’était extrêmement douloureux. J’ai vu des hommes mourir après ces chocs électriques, leur cœur n’y résistait pas », raconte Volodymyr Shevtchenko, un ancien prisonnier de guerre qui a passé plus de deux ans en captivité en Russie. Serhii Koroma, un autre prisonnier de guerre ukrainien, gravement blessé avant sa capture, a déclaré qu’il n’avait reçu qu’une seule fois un antiseptique local, avant d’être laissé sans soin.
Plus de 4000 prisonniers, 15000 disparus
Les chiffres précis sont difficiles à établir vu le manque de transparence des Russes. D’après les dernières estimations : En Mai 2022 : des responsables des territoires séparatistes pro-russes affirmaient détenir environ8 000 soldats ukrainiens. En Décembre 2022: les autorités ukrainiennes estimaient que 3 392 militaires ukrainiens étaient emprisonnés en Russie, tandis que 15 000 soldats et civilsétaient portés disparus. En Novembre 2023 : environ 4 337 Ukrainiens étaient encore détenus par la Russie, dont 3 574 soldats et 763 civils.
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