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Megan Rapinoe, la footballeuse qui tacle Trump

publié le 13/01/2025 par Pierre Feydel

Virtuose du ballon rond, lesbienne, féministe et de gauche, elle incarne tout ce que les Républicains détestent. Grâce à sa notoriété, elle les défie

Elle représente à peu près tout ce que Donald Trump déteste. D’abord, c’est une femme, donc quelqu’un qui échappe au virilisme affiché du 45e président des États-Unis et qui appartient à un sexe pour lequel il n’a pas montré beaucoup de respect. Qui plus est, elle est une gay affichée et militante, défendant la cause LGBT avec acharnement. Et bien sûr, une féministe intransigeante sur l’égalité homme-femme. Sans oublier ses sympathies pour les démocrates, et pas toujours les plus modérés, telle la représentante de New York Alexandria Ocasio-Cortez, proche de Bernie Sanders.

Médaille d’or aux Jeux olympiques

Mais voilà, Megan Rapinoe est une championne qui, par deux fois, a porté l’équipe américaine de football féminin à la tête de la Coupe du monde, en 2015 et 2019. Elle a remporté avec son équipe la médaille d’or aux Jeux olympiques de Londres en 2012. Elle a accumulé les distinctions : soulier d’or et ballon d’or en 2019, meilleure joueuse de la FIFA la même année. Elle a alors 34 ans. Elle est au sommet de son art.

Une gagnante donc, que Trump, qui déteste tant les « losers », devrait apprécier. Sauf que, bien sûr, à ses yeux, elle cumule les ingrédients d’un cocktail répugnant : une bonne dose d’homosexualité, trois doigts de féminisme, le tout noyé dans une solide rasade d’opinions de gauche affirmées. Pour les trumpistes, un breuvage à vomir.

Parmi les 100 personnes les plus influentes pour Time

Sauf que Megan Rapinoe est un personnage qui jouit, aux États-Unis, d’une vraie célébrité. À deux reprises, elle a fait partie des 100 personnes les plus influentes du magazine Time. En juillet 2022, l’athlète reçoit la médaille présidentielle de la Liberté. En 2019, après la victoire de l’équipe américaine à la Coupe du monde féminine de la FIFA, la capitaine Rapinoe et ses coéquipières deviennent la première équipe féminine à être honorée par une parade sur Broadway, à New York, sous une pluie de confettis.

Ce jour-là, devant l’hôtel de ville de la Grosse Pomme, elle déclare : « C’est de mon devoir de vous dire cela… Nous devons être meilleurs. Nous devons aimer davantage, haïr moins. Nous devons écouter plus et parler moins. Nous devons savoir que c’est de la responsabilité de chacun. C’est de notre responsabilité de rendre le monde meilleur. »

Un discours anti-Trump

Quoi de moins « trumpien » qu’un tel discours ? Elle utilise les succès des joueuses pour en faire des exemples d’humanité. Elles ne gagnent pas parce qu’elles sont plus fortes, elles gagnent parce qu’elles sont meilleures. D’ailleurs, elle-même s’engage dans de multiples combats : pour égaliser les salaires entre les joueuses et les joueurs de « soccer », elle porte plainte contre la Fédération américaine de son sport auprès de la Commission chargée de l’égalité des chances en matière d’emploi. Les juges ne lui donnent pas raison.

Alors, elle va plaider sa cause auprès du président Biden. En 2022, la Fédération américaine cède : en équipe nationale, hommes et femmes seront payés de la même façon. En 2023, elle soutient une footballeuse islandaise de l’Olympique lyonnais que le club a sous-payée pendant sa grossesse. Elle-même a joué dans ce club en France.

Elle a boycotté… l’hymne américain

Cette femme engagée a d’autres cibles : la Cour suprême, qui abandonne le droit à l’avortement au bon vouloir des États ; la Ligue nord-américaine, qui renâcle à protéger les joueuses malgré le témoignage de 200 d’entre elles concernant des actes de harcèlement ou d’agression sexuelle, souvent dus aux entraîneurs. Elle va jusqu’à boycotter l’hymne américain avant les matchs, en hommage à Colin Kaepernick, le quarterback des 49ers de San Francisco, qui, en 2016, a refusé de se lever et de chanter pour protester contre les violences policières envers les Afro-Américains.

Trois ans plus tard, alors que son équipe a gagné la Coupe du monde, elle refuse toujours de chanter le Star-Spangled Banner, cette fois pour protester contre la politique de Donald Trump. La championne refuse également les invitations du président républicain à la Maison-Blanche. Elle lui répond : « Votre message exclut les gens. Vous m’excluez. Vous excluez les gens qui me ressemblent. »

Face à Donald Trump, gardien de cage ultra-réactionnaire

Qu’est-ce qui peut donner à cette Italo-Irlandaise, issue d’une famille de sept enfants, diplômée en sociologie, passionnée de guitare et bien sûr de football, la force d’affirmer ainsi haut et fort de telles convictions ? Peut-être son talent footballistique lui a-t-il donné une confiance en elle sans pareille ? Son jeu fluide, habile, efficace, a fait merveille sur les pelouses. Homme ou femme, elle est la seule capable de faire entrer directement dans les filets un tir de corner puissant, lifté, imparable.Donald Trump, gardien de la cage ultra-réactionnaire, devrait se méfier de ces adversaires-là. Ils ne cessent de marquer des buts contre lui.


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