UKRAINE. Kherson, chronique d’une ville martyre, occupée et libérée.
Images et texte Alexandre Larcan.
Kherson, cette ville du sud de l’Ukraine de 270 000 habitants, avait été le seul centre régional conquis par les Russes, dès le 1er mars. Dix jours après la libération de Kherson, le 11 novembre 2022, les habitants subissent les bombardements russes. Après huit mois d’occupation, l’armée russe a dû se retirer. Mais elle est de l’autre côté du fleuve, sur la rive gauche du Dniepr, et semble déterminée à punir ce revers humiliant et reprendre cet emplacement stratégique.
Images Alexandre Larcan, qui a participé au stage grandsreporters.com, hiver 2022.
Libération!
Scènes de liesse dans la ville, sur la grande place Svoboda. Les drapeaux ukrainiens sont hissés sur des bâtiments administratifs, les voitures klaxonnent, les affiches pro-russes sont déchirées et les habitants accueillent avec émotion les soldats ukrainiens, accueillis en héros, en les étreignant et en leur offrant des fleurs.
Les civils scandent à haute voix les slogans : « Gloire à l’Ukraine » et « Gloire aux héros ».
Les habitants marchent dans les rues, enveloppés dans le drapeau ukrainien, bleu et jaune, qu’ils font fièrement signer aux autorités locales ou aux soldats quand ils les croisent. Ils posent pour une photo avec leurs libérateurs. Une intense émotion et un fort sentiment patriotique émanent de cette ville.
Retour de trains, des convois routiers, de l’aide humanitaire.
La liaison ferroviaire a été réouverte entre Kiev et Kherson une semaine exactement après le retrait russe, permettant à des familles de se retrouver. La réouverture de la ligne doit également permettre d’approvisionner Kherson qui a désespérément besoin d’aide humanitaire.
Des convois de toute l’Ukraine continuent d’arriver en ville. Des camions des régions d’Ivano-Frankivsk, Vinnitsa, Odessa, Kirovograd et Lviv apportent des produits alimentaires, l’eau potable, des médicaments, des produits d’hygiène. Pour l’électricité, les autorités ou particuliers aident à fournir des générateurs. Des bornes de recharge ont été installées dans la ville où les gens viennent en masse recharger tout appareil électronique, téléphones portables, rasoirs électriques, voire jouets pour enfants.
Après l’euphorie, la frustration.
Les habitants font désormais la queue pour pouvoir récupérer des cartes SIM et obtenir le versement de pensions. Des bandes de jeunes adolescents orphelins arpentent la ville à la recherche de nourriture ou cadeau, en imitant avec de fausses mitraillettes, leurs ainés les soldats. Dans leurs regards, profonds, yeux cernés, on peut lire l’espoir de retrouver un membre de leur famille.
Les premières vagues d’euphorie ont parfois cédé la place à de la frustration alors que des foules désespérées se précipitent pour obtenir des dons de nourriture et de vêtements d’hiver. Des bousculades éclatent quand certains essayent de repasser deux fois demander l’aide humanitaire. Les volontaires courent dans tous les sens pour essayer au mieux de contrôler la situation. Les militaires assurent aussi la sécurité, les livraisons sont irrégulières, les besoins sont immenses.
Résister, encore résister, toujours résister…
Les températures chutent. Sans électricité, ni chauffage, et sans un approvisionnement régulier en eau, la vie quotidienne a des allures de survie héroïque. Malgré ces conditions quotidiennes, les menaces militaires et une inquiétude qui est palpable, la plupart des habitants de Kherson ne veulent céder ni à la pression ni à la peur.
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