Algérie. Série Benjamin Stora. Karl Marx, un ticket pour l’intégration? Épisode 4.
La lutte des classes ! Ça au moins, c’est universel, ni algérien, ni français, ni Pied Noir. Un communiste prussien allait offrir Benjamin Stora son ticket pour l’intégration. Karl Marx l’invitait alors à un voyage bien différent.
Prise de parole militante en 1973 • Crédits : ©Archives Privées Benjamin Stora
L’Algérie, pour Benjamin Stora, c’était fini. Enfin presque. Car elle devenait à ce moment précis, un objet purement politique tandis qu’il cessait d’être le Pied Noir pour devenir français à part entière grâce à son engament à l’Organisation Communiste Internationaliste.
C’était formidable pour moi de retrouver une fraternité et de sortir de l’isolement et sortir de la dispersion parce que dans l’exil, toute ma famille s’était retrouvée dispersée. Je retrouvais la chaleur d’une nouvelle famille.
C’est Nanterre, lieu de tous les « ismes » possibles et imaginable, des trotskistes, des maoïstes, des lambertistes, la GP, les anarchistes, les communistes…
Le militantisme politique était une formidable école. On connaissait l’histoire de tous les pays, etc. Par conséquent, le retour à l’Algérie se fait par la politique.
Le militantisme politique comme famille de substitution
Le militant révolutionnaire qu’il devient alors, le ramène en Algérie avec les partisans de Messali Hadj, pionnier de l’indépendance dès le milieu des années 1920.
J’ai soutenu mon mémoire de maîtrise sur le MNA parce que j’avais toutes les archives de Messali car les archives (lettres, correspondances, tracts) étaient dans l’organisation trotskiste, qui avait soutenu Messali. (…)
Ensuite, je rencontre Janina Benkelfat, la fille de Messali qui va me donner les mémoires de son père, qu’il avait rédigé juste avant de mourir en écrivant en français et une partie en arabe. Et là, je vais soutenir ma thèse en 1978 sur Messali, la biographie de Messali, qui a ensuite été rééditée plusieurs fois.
J’ai essayé de comprendre l’histoire des émotions, l’histoire des sentiments, c’était aussi la volonté d’entrer dans l’histoire par en bas. L’histoire interpersonnelle, l’histoire individuelle, l’histoire des hommes, des individus et ensuite l’histoire des familles. Et comment des familles se sont déchirées entre elles. (…) Une sociologie de l’Algérie qui s’éloigne des conceptions toutes faites. J’ai commencé à me servir de ma propre expérience pour comprendre ce qu’était l’histoire de cette Algérie.
Une école d’apprentissage intellectuel extraordinaire dans laquelle on apprend et on dissèque le moins mouvement révolutionnaire de chaque pays. Une famille de substitution avec laquelle on rêve d’un monde nouveau et de lendemain qui chantent. Débarrassé de ce qu’il appelle « son marxisme étroit », il assiste à la prise de pouvoir du parti socialiste qui a fini par absorber tout ce qui existait comme mouvements d’avant-garde de l’époque, le féminisme, l’écologie…
« Un mouvement attrape-tout » comme le dit Benjamin Stora. Le PS avait « mangé» toutes les forces politiques de gauche de l’époque. Un autre déracinement. Benjamin Stora va désormais se consacrer à la recherche de l’Histoire. « Le Stora » est né.
Le PS devenait la force dominante. Et c’était en même temps un laboratoire d’analyse, d’expériences qui à l’époque absorbait tout ce qui existait comme mouvement d’avant-garde de l’époque.
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