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Édito : Antivax, Novax, Faux Vax…tous victimes ! par le professeur Frédéric Adnet.

Edito publié le 12/01/2022 | par Frédéric Adnet

Le journal du Covid du professeur Adnet

Nous sommes en Seine–Saint-Denis, département où la couverture vaccinale anti-COVID est la plus faible de la France métropolitaine avec 63,8% de vaccinations complètes.

Les patients, faute de médecins traitants, autre caractéristique de notre département, consultent ainsi massivement aux urgences de l’hôpital.

Qui sont -ils ?

Durant mes journées passées aux urgences, je retrouve souvent « le » profil, caricatural.

D’abord :

– Bonjour, Docteur, j’ai de la fièvre, je tousse et je suis PCR+

– Bonjour Monsieur, vous êtes vacciné ?

– (…)

– Êtes-te vous vacciné ?

– Ben …. ( Petite voix) non….

– ???

Ensuite, au choix :

J’ai pas eu le temps ! / J’allais le faire !  / J’ai déjà eu le Covid ! /  Je ne sais pas comment faire ! / Tous les rdv sont pleins !

– Ou, beaucoup plus rare :

C’est mon choix / Ça vous regarde pas / On manque de recul, non ? / J’ai pas confiance.

 

Bon, il est sûr que la non-vaccination fait partie de l’interrogatoire médical pour évaluer le risque d’évolution vers une forme grave de la COVID-19, la réanimation ou la mort. Vacciné ou pas, à moi ensuite de décider ou non un traitement précoce à base d’anticorps monoclonaux ou la décision d’un retour à domicile.

Ainsi, la non-vaccination devient – médicalement- un facteur de risque important à côté de l’obésité, de l’âge, ou du diabète.

 

Ces patients me font penser aux patients alcooliques ou tabagiques dont il est essentiel de connaître les habitudes addictives et qui – en vous regardant bien droit dans les yeux – nient ou minimisent leur l’addiction.

La différence fondamentale avec le cancéreux fumeur ou le cirrhotique alcoolique réside dans le fait que chaque paquet de cigarette contient une mention sur le tabac qui avertit du danger de mort, alors que chaque seringue de vaccin affirme au contraire que cela peut vous sauver la vie. À ma connaissance, il n’existe pas de courants complotistes actifs visant à démontrer que le tabac ou l’alcool sont… bénéfiques pour la santé.

 

La déontologie médicale et le bon sens du médecin imposent de ne pas distinguer un anti-vax, un « non-vax » ou un « faux-vax » d’un autre patient, vacciné. Difficile pourtant de ne pas leur faire « la morale », à condition d’en avoir l’énergie ! Mais notre expérience a largement démontré que, face à un alcoolique ou un fumeur invétéré – cette démarche ne marche pas. Finalement, cette posture asymétrique face à un patient Covid en infériorité physique et en demande de soins est, somme toute, assez lâche.

 

Finalement, ce sont des victimes, doublement victime :

1/ victime de la Covid capable d’envoyer notre non-vax en réanimation ou à la morgue et, deuxièmement

2/ victime de la désinformation induisant un rejet du vaccin.

Ce phénomène de désinformation anti-vaccin existait déjà lorsque des nouveaux vaccins étaient proposés depuis la variole jusqu’à l’hépatite B. Censés provoquer l’autisme ou la sclérose en plaque. Pas moins !

 

Sauf que la caisse de résonance des réseaux sociaux et des chaines d’informations continues a largement imprégné la population d’une information accessible, mais fausse, reposant sur un obscurantisme profond. Discours synonymes de « buzz », donc largement relayés.

À l’inverse, en période électorale, le discours rationnel pro-vax du pouvoir en place utilisé avec malice et calcul politique enferme les opposants de droite et de gauche dans une posture antiscience, électoralement destructrice.

En analysant plus profondément les réseaux leaders de la désinformation, nous retrouvons clairement un phénomène de secte.

Certains adeptes anti-vax ne sont plus accessibles ni au dialogue ni au raisonnement. Sur leur lit de mort, ou de réanimation, ils continueront à affirmer que le vaccin est plus dangereux que la maladie. Ce qui s’apparente aux phénomènes d’addiction décrits par les toxicologues. L’autre caractéristique sectaire est l’intérêt financier. On voit le rapprochement des mouvements anti-vax avec des organismes de recours juridiques, de traitements médicamenteux et de réseaux d’informations. Tous bidon, mais payants et lucratifs.

Plus inquiétant, les rapprochements avec des mouvements d’extrême droite, voire carrément complotistes comme Qanon ou autres dangereux illuminés.

Reste que la grande majorité des non-vax est constituée des patients qui reconnaissent l’évidence et sont finalement à considérer comme des victimes consentantes. Sans plus.

La recherche d’une repentance pose quand même le problème éthique du respect de la personne et n’est pas, à mon sens, à rechercher même si cela peut nous procurer la satisfaction …d’avoir raison.

 

Alors oui, soignons-les tous, sans aucun tri ou discrimination.

Sans occulter le débat éthique sur la perte de chance des autres patients, déprogrammés, faute de place dans nos hôpitaux.

D’un côté, on évite une mortalité immédiate des patients Covid.

De l’autre, on augmente la mortalité des malades chroniques, que nous n’avons pas pu rendre en charge à temps.

Alors ?

Alors, c’est à la société et aux politiques de trancher.

Nous, nous soignons tout le monde.

 

 

 

 

 


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