Irak:Quand les soldats meurent
« Irak : Quand les soldats meurent. »
Ils nous regardent droit dans les yeux. L’un, derrière ses lunettes d’étudiant, flottant dans un casque trop grand pour lui. L’autre, torse nu, en bretelles, membre des Forces spéciales, musclé et l’air arrogant. Le troisième, en uniforme vert, coiffé d’un béret noir posé en biais, la bouche dure, presque brutale.
Au-dessous, des verres ronds cerclés de métal et des cheveux crépus, grisonnants, ceux d’un homme sage comme un prof de Harlem. Un autre, ou plutôt une autre, rouge à lèvres brillant, calot bleu sur une coiffure lisse, uniforme impeccable et cravate. Et lui à côté, si pâle, fantôme flou, regard perdu. Peau blanche, peau noire, teint rose, mat ou brûlé, issus des rues de Brooklyn, du Middle West ou des usines de Detroit, immigrés mexicains, fils de pêcheurs portugais ou de boat people vietnamiens, héros ou salauds tombés au combat, victimes d’un ricochet ou d’un chauffard sur la route… c’est une armée des morts américains.
A Washington, deux cent artistes ont entrepris de peindre le portrait de chaque soldat tué en Irak. Et de les montrer au public. Pour protester contre l’absence d’images des soldats morts au combat et les body bag rapatriés la nuit sur des bases militaires. Ces morts que l’Amérique officielle ne veut pas montrer.
On leur avait dit qu’ils partaient en Irak pour « lutter contre la terreur, éradiquer les armes de destruction massive, abattre le tyran et instaurer la démocratie.. »
Aujourd’hui, après trois ans de guerre d’occupation, plus de 2300 soldats tués et la fin des mensonges, l’Amérique est prise par le doute. De Washington DC aux banlieues noires de Philadelphie, des fermes du Wisconsin aux villes casernes de Caroline du Nord, de Virginie au désert de l’Arizona, le film retrouve les familles des disparus. Katleen Roberts, bourgeoise blanche et républicaine, qui se demande aujourd’hui pourquoi son jeune frère pilote est allé mourir en Irak. Jackie Dickson, noire, patriote et très religieuse, qui pleure son fils et s’en remet à Dieu. Sonia Rivera, d’origine Portoricaine, qui n’accepte pas que son mari ait été tué en cherchant des armes imaginaires.
La famille Piestewa, indiens Hopis d’une réserve d’Arizona, dont la fille Lorie est la première femme-soldat et la première indienne tuée en Irak. Et John Straseskie, père de Kirk le lutteur, mort en héros, lui-même vétéran du Vietnam, fils et petit-fils de militaire, soldat de toutes les guerres, mais fou de rage contre son gouvernement, son président et une guerre à laquelle il ne croit pas.
Voyage au cœur d’une Amérique profonde, désormais partagée entre le doute, la confusion et la colère.
ARTE/COMPAGNIE DES PHARES & BALISES