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Yucatan, Mexique. La naissance des écritures « La nuit des Mayas »

publié le 08/08/2021 | par Jean-Paul Mari

Chapo Uxmal, Chichen Itza, Palenque: des cités enfouies dans la jungle dont les seuls noms fascinent encore cinq siècles après l’arrivée des conquistadores espagnols. Cette culture maya, Jean-Paul Mari l’a redécouverte parmi les ruines sacrées du Yucatan. Il raconte l’extraordinaire aventure du franciscain Diego de Landa, à la fois bourreau et sauveur d’une civilisation dont il recopia minutieusement les grands livres avant de les livrer aux feux de l’Inquisition. Car ces «sauvages» qu’il venait évangéliser maîtrisaient la mathématique, l’astronomie, et surtout une écriture qui n’a pas encore livré tous ses secrets


«Le grand livre des glyphes s’appelait Xocen, qui veut dire Lis-Moi. Il était l’origine du monde: c’est un livre naturel et il n’a été fabriqué par personne. Le livre tourne tout seul ses pages, une par jour. Et si quelqu’un veut la tourner intentionnellement, il saigne parce qu’il est vivant.»

 

L’un après l’autre, frère Diego de Landa jette les grands livres des Mayas sur le bûcher. Debout face aux flammes, l’inquisiteur affronte le diable. Le feu gronde, noircit, dévore, et autour de la fournaise s’élève une longue plainte, celle des Indiens pendus par les pieds, battus de verges, tondus et aspergés de poix bouillante. Un peu plus loin, d’autres indigènes attendent, tête basse, hérétiques coiffés du san-benito, la casaque jaune dont on revêt ceux promis au bûcher de l’Inquisition.

Ce dimanche 12 juillet 1562, sur la grande place de San Miguel de Mani au Yucatan, la fumée et les cendres de l’Inquisition emportent 5 000 précieux codex, parchemins délicatement enluminés de couleurs végétales, peints à la brosse de hérisson, des statues de bois finement gravées, des manuscrits en peau de daim et en écorce de figuier sauvage.

Écrits par les anciens pour que leurs descendants ne vivent pas dans l’obscurité, ils disaient le temps passé, l’épopée des ancêtres, leurs rêves, leurs guerres et leurs prophéties, la parole des dieux, le calendrier lunaire, les almanachs, les tables d’éclipses, le mouvement des étoiles, de la planète Vénus. Et les prières à faire pour que Chaac, le dieu de la Pluie, assure d’abondantes récoltes de maïs et de graines de cacauatl, le cacao.

Huit siècles de littérature et de culture maya s’en vont, et avec eux toute l’histoire d’un peuple né bien avant Jésus-Christ, celui dont Diego de Landa, frère franciscain et évêque du Yucatan, invoque le nom au-dessus du brasier.

«Les vices des Indiens sont l’idolâtrie, la répudiation, les orgies publiques, la vente et l’achat des esclaves», écrit Diego de Landa. L’homme d’Eglise est un noble espagnol, issu de la maison de Calderon, né en 1524 à Alcarria, près de Tolède. A 16 ans, il prend l’habit franciscain; neuf ans plus tard, il accompagne une mission qui vogue vers le Nouveau Monde, débarque au Mexique, pousse jusqu’au Guatemala et revient s’installer au Yucatan.

Avec lui, il ramène une statue guatémaltèque de la Vierge qu’il veut installer chez les sauvages, à Mérida. Mais voilà qu’en chemin la statue devient de plomb. Rien n’y fait, ni les chariots, ni les puissants attelages de boeufs, ni le système de cordes graissées: la Vierge s’est arrêtée à Izamal. Elle y restera pour être adorée, miracle de la «Vierge récalcitrante».

Diego de Landa est venu au Yucatan avec une obsession: évangéliser les sauvages et sauver leurs enfants de l’enfer. Il est stupéfait de constater la détresse des Mayas, durs aux supplices du bourreau, mais qui poussent d’affreux hurlements face au spectacle de leurs écritures jetées au feu: «Plusieurs d’entre eux, trompés par le démon, se pendirent de douleur», écrit-il, surpris mais inébranlable.

Diego de Landa est un soldat du Christ, un homme au visage long, grand front, pli tombant au coin des lèvres minces, un nez droit autoritaire, mais de grands yeux étonnants, aux longs cils, quasi féminins. A Campeche, en 1842, un de ses biographes le décrit sous les traits d’un fanatique odieux, extravagant et cruel, caricature de l’Inquisition; un autre souligne au contraire un esprit curieux, bien plus sage qu’il n’apparaît, ami sincère des indigènes, qu’il protège constamment contre la violence des conquérants.

De fait, l’homme est tourmenté et ambigu, comme un bourreau fasciné par sa victime, la culture maya, démon qu’il envoie résolument au bûcher. Même si, avant de tout expédier en enfer, il prend soin de noter ce qu’il peut, les moeurs, les rites, les légendes, la mythologie, et surtout les glyphes – caractères de l’écriture maya -, dans un livre de 3000 paragraphes divisés en 225 chapitres, «Relacion de las cosas de Yucatan», énorme manuscrit devenu aujourd’hui la bible des chercheurs modernes. Etrange Diego de Landa qui dans le même temps assassine une culture et la sauve…

Cinq siècles plus tard, on marche dans les ruelles d’un village aux toits de palmes entouré d’une épaisse forêt tropicale où courent le cerf, le cochon sauvage et l’agouti, gros rongeur de la taille d’un lièvre. Dans les champs, les hommes plantent toujours le maïs avec un xul , simple bâton ferré, et il vous offre «l’eau blanche», une calebasse de poudre de maïs délayée à l’eau, agrémentée de cacao ou d’un piment vert très fort.

On regarde ces visages cuivrés identiques à ceux des stèles et des céramiques anciennes; ils parlent une langue glottale archaïque, le chol ou le yucatèque. Dans Nunkini, «là où le soleil se courbe», entre Mérida et Campeche, à quelques heures mais à des années-lumière des plages de Cancun, les Mayas sont toujours vivants!

C’est ici que Michel Boccara, ethnologue et intellectuel nomade, a décidé de camper six mois par an, avec sa femme et ses trois enfants, sans eau, sans électricité, dans de grands hamacs qui se balancent au vent des mythes de la Méso-Amérique. A l’intérieur, des murs chaulés de blanc, deux bancs en bois; et l’ethnologue ascète en short déchiré, mince et chauve, nuage de barbe sale de trop de poussière avalée sur les sites.

Il crayonne un glyphe maya, un dessin rond aux formes complexes, caractère que les scribes peignaient, gravaient sur la pierre, le plâtre, le stuc, la céramique, un coquillage ou un os. Et il prévient, solennel: «Attention: au-delà de cette ligne, dès le premier glyphe, nous entrons… dans la nuit des mots mayas. Prêt?» Prêt.

Les Indiens disaient ts’ib pour dire écrire, dessiner ou peindre. Et xok pour lire et deviner. Comme le chaman qui lit dans les entrailles de l’animal. «Pour lire ou écrire, il faut plonger au coeur de l’énigme.» A l’aube du monde, raconte le grand récit épique du «Popol Vuh», les jumeaux célestes descendirent aux enfers pour combattre le maître des ténèbres, celui qui fait disparaître.

En mémoire de ce combat, les Mayas inventèrent une écriture d’un millier de signes, effroyablement compliquée, bourrée d’allographes et de polyphones, où chaque signe peut avoir plusieurs sens, chaque son plusieurs caractères distincts et chaque mot plusieurs sens. L’écriture, obscure et nocturne, n’est pas là pour expliquer, clarifier et dévoiler les mystères du monde mais pour le masquer, car le monde lui-même est énigmatique.

Le scribe qui veut se rendre maître de l’écriture doit, comme les jumeaux célestes, descendre armé de sa plume jusqu’aux enfers et livrer le combat contre l’obscurité. Quand il reviendra, transformé en seigneur de la nuit, il fera partie du monde des morts. Lire, c’est dessiner; écrire, c’est deviner. Et apprendre à mourir.

On repense à la phrase de Blaise Cendrars: «Ecrire c’est brûler vif, mais c’est aussi renaître de ses cendres.» Les Mayas étaient obsédés par la mort, donc par la renaissance. Michel l’ethnologue parle le yucatèque et il a découvert comment les Mayas appelaient leur écriture: ak’ab ts’ib , l’écriture de la nuit.

Décomposons: ak’ab est la nuit, l’obscurité, celle de l’origine des temps. Ce glyphe est un cercle, marqué de trois encoches, deux supérieures et une autre plus grande, en bas et au centre, en forme d’un grand Y renversé. Dans cette écriture monosyllabique, la première partie, une fois détachée – ak’ -, veut dire le clitoris de la mère cosmique, représenté en Y. Répété trois fois, il devient ak’ab . Trois, en maya, dit aussi l’infini, abondance et noix-pain.

La deuxième partie du mot ak’ab est le k’ab, comme kab, qui dit le monde-terre-miel. Et comme les Mayas jouaient déjà avec le verlan, ils transformaient aussitôt kab en bakab, ces atlantes qui soutiennent le monde à l’envers, êtres dont les yeux sont fermés à l’éveil mais ouverts et exorbités quand ils dorment. Compliqué? Attendez.

La traduction d’ak’ab, glyphe de la nuit, renvoie donc à la fois vers l’origine de la création; ce clitoris ak répété trois fois dans sa dimension nourricière et infinie qui contient le kab, monde riche, terre et miel qui, à l’envers, dit l’atlante, le père qui soutient l’univers sur ses épaules…

Un seul glyphe est un voyage initiatique et poétique qui fouille le sens grâce à un labyrinthe de mots. Fais ton choix, scribe! Avec ce que tu sais déjà. Comme dans la cabale, le sens dernier reste impénétrable à l’homme. L’écriture est un savoir obscur, le commun ne peut pas résoudre l’énigme parce que l’énigme est le langage de la pureté.

Le vertige vous prend et on se retrouve dehors, ébloui par le soleil de Nunkini, en regardant d’un oeil différent les paysans du village. C’est ici qu’on a écrit le «Livre des bakabs», sans doute le plus ésotérique de la littérature maya, recueil d’incantations, de charmes et d’envoûtements qui donne les clés de la symbolique.

Dans la maison d’en face, ce vieillard ratatiné et paisible n’est autre qu’un chaman, prêtre-sorcier devin et thérapeute, qui connaît par coeur et sans l’avoir jamais lu de longs passages du prophétique Chilam Balam. Quand la terre souffre du manque de pluie et que la vie devient impossible, c’est lui qui invoque le mythe du Rêveur d’Eau.

Chaac, le dieu de la Pluie au nez en trompe d’arrosage, dormait quand il rêve qu’une jeune fille, Yaxcé, prisonnière d’un tronc de fromager, l’appelle au secours. Chaac se réveille, prend son couteau en pierre, ouvre l’arbre et l’eau jaillit: «L’eau est la mère cosmique qui rappelle à son fils qui l’a délaissée qu’on ne peut rien faire sans elle, explique Michel. « Délivre-moi, lui dit-elle, et le monde revivra. » Le chaman de Nunkini sait bien, lui, qu’il ne faut jamais oublier les dieux.»

A une centaine de kilomètres de là, on flotte sur un ruban d’asphalte brillant délavé par un orage diluvien. Soudain, Uxmal, ancienne cité maya, émerge dans la vapeur d’eau surchauffée. Uxmal, qui veut dire «trois fois-maïs-grenier-abondance…», ville de 16 kilomètres carrés entourée d’un mur, née neuf cents ans avant Jésus-Christ, morte au xiiie siècle, abandonnée après dix ans de sécheresse absolue. Parce qu’il ne faut jamais oublier d’invoquer le dieu Chaac!

A l’entrée, la première des 1000 citernes qui retenaient 27000 litres d’eau de pluie. On glisse, par 45 degrés à l’ombre, sur la «place carrée des oiseaux», face à Quetzal, le dieu aux plumes de colibri et aux ailes de pierre. Ici, le grand calendrier lunaire compte une année de deux cent soixante jours et le cycle d’éclipse de Vénus cinquante-deux ans, après quoi, sans l’indispensable action de grâces, le monde inévitablement s’écroulait.

Là, le temple de Chaac. Dans la cour, un rocher oblong au centre d’un carré de terre, hommage au phallus du Soleil qui féconde la terre nourricière. Plus loin, la «maison du nain», fils prodigieux issu d’un oeuf de jaguar couvé par une sorcière, qui a construit un grand temple en une nuit, a inventé une figurine respectée par le feu, la céramique, et percé l’énigme mathématique du dénombrement des feuilles des arbres avant de prendre le pouvoir pendant soixante-dix vies mayas.

Sur l’immense «carré des prêtresses» à l’extraordinaire acoustique, il suffit de claquer dans ses mains pour rappeler l’écho des habitants du passé: «Les Indiens du Yucatan sont bien faits, se baignent fréquemment et aiment les odeurs suaves; les hommes ont le corps tatoué et enduit de peinture rouge, des cheveux longs et usent de miroirs», écrivait, séduit, Diego de Landa. «Ils tiennent pour grande élégance le fait de loucher, ont la tête et le front écrasés entre deux planches dès l’enfance, portent les oreilles percées et scarifiées et n’ont point de barbe parce que les mères leur brûlent le visage avec des linges chauds…»

Du jeu de pelote d’Uxmal, il ne reste que les gradins et un énorme anneau de pierre en hauteur où les deux équipes devaient faire passer une balle de caoutchouc de deux kilos. Les perdants y laissaient leurs biens. Et leurs vies. Ici, en cas de sécheresse, on se sacrifiait à Chaac: «Ils offraient leur propre sang, se déchiraient les oreilles par lambeaux, se perforaient les joues, la lèvre inférieure, la langue, y passaient un fétu de paille, ce qui occasionnait de grandes douleurs, et se coupaient le superflu du membre viril…»

Quand la souffrance ne suffisait pas, il fallait offrir la vie animale ou humaine: «Les uns donnaient des esclaves; d’autres, par dévotion, livraient leurs petits enfants», décrit, horrifié, le franciscain. «On amenait la victime dans la cour du temple, les Chacs renversaient la victime avec rapidité et la tenaient tous quatre par les bras et les jambes écartés par le milieu. A cet instant, le bourreau Nacone arrivait avec son couteau de pierre, frappait entre les côtes sous le sein gauche; puis il y plongeait la main aussitôt et en arrachait le coeur palpitant avec la rage d’un tigre, le déposait dans un plat devant le prêtre qui s’empressait de le saisir pour oindre avec le sang qui en dégouttait le visage des idoles!»

On s’assied à même le dallage fin d’Uxmal. Un iguane passe sur le vert moussu du sol, des vols d’hirondelles quadrillent les cumulus cotonneux d’un ciel bleu satiné. Ces gens étaient tout à la fois des guerriers terribles et durs au mal, des hommes d’harmonie, des paysans doux et cultivés et des matheux au cœur tendre et sanglant. Autour de la grande place s’ouvrent les salles consacrées à l’astronomie, la géographie, la géométrie ou la botanique.

Leurs chamans faisaient de l’algèbre divinatoire à partir de 64 grains de maïs – deux puissance six – et ils ont inventé le zéro, l’oeil de dieu, et l’infini qu’on lisait dans les spires de l’escargot de mer. «Leur savoir scientifique, si développé, restait lié à la terre vivante, mythique: voilà le miracle maya…», dit Michel l’ethnologue. Uxmal était le zéro, le point de départ du chemin qui partait en direction de Nunkini, «là où le soleil se courbe», et continuait, toujours vers l’ouest, vers la grande nécropole des souverains mayas.

Au coeur de la forêt, sur des dizaines de kilomètres, on a retrouvé des pierres ordonnées tous les cinquante centimètres, bornes qui montraient le chemin à suivre vers la mort. Ce matin, avant l’arrivée du jour, Michel a marché vers l’ouest, vers Ch-Kam-Maya-Mul, les «quatre tertres mayas» disposés selon la forme exacte du glyphe du soleil, cité inconnue et enfouie sur plusieurs kilomètres carrés qui n’a pas encore été pillée, dévastée par les riches collectionneurs privés américains.

Aux côtés de Michel marchait un chaman, porteur de l’eau blanche, le maïs cuit sans chaux, le cacao, le sucre et l’aguardiente, offrandes destinées à demander la permission aux dieux de fouler leur sol interdit. C’est ici, à Ch-Kam-Maya-Mul, que le souverain devait faire sa dernière halte rituelle avant la mort, le temps de rencontrer le grand prêtre de Nunkini, de se charger d’énergie sacrée et de s’identifier au soleil couchant.

Ensuite seulement il pouvait s’en aller plus à l’ouest, vers la côte, et s’enfoncer dans cette région de marécages, de buissons aquatiques, de petits lacs d’eau douce et salée, de bras de mer boueux et d’infinis méandres, vers Jaina, l’île-nécropole des dieux. Ensuite seulement il pouvait mourir, sûr de renaître.

«Ces gens ont toujours cru à l’immortalité de l’âme, bien plus que d’autres nations, quoiqu’ils ne fussent pas aussi policés», écrivait le franciscain inquisiteur tourmenté. «Ils ne pouvaient pas dire d’où leur venaient les croyances relatives à leur paradis et à l’enfer. Quant à cette survie, bonne ou mauvaise, ils disaient qu’elle n’avait point de fin, l’âme n’en ayant pas…», dira encore Diego de Landa vieillissant, profondément ébranlé d’avoir rencontré, aimé et détruit la culture d’un peuple maya à la spiritualité aussi forte que sa foi de chrétien.

Du haut de la plus grande pyramide d’Uxmal, on domine dans un silence absolu toute la campagne du Yucatan. Avec, sous soi, une mer arborée d’un feuillage léger et moussu, comme une étendue liquide ondulée par des vagues. De cet océan végétal émergent les autres pyramides, le carré des oiseaux et des prêtresses, le marché, le jeu de pelote, géants assis aux formes dépouillées et puissantes.

L’orage éclate et la pluie lourde dévale les marches vertigineuses de la pyramide, ruisselant sur la pierre lavée des gargouilles. Noyée dans l’eau du ciel, face à la forêt brune qui s’étend loin jusqu’aux frontières des nouvelles cités barbares, les ruines mayas d’Uxmal se métamorphosent alors en quais, en docks, en port d’une île du passé, d’un continent perdu.

JEAN-PAUL MARI

Jean-Paul Mari

Publié à l’été 2006

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