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4/ Boris Johnson: au sommet mais proche de la fin

publié le 09/08/2023 | par Jean-Paul Mari

Alexander Boris de Pfeffel Johnson, dit Boris Johnson, ex-premier ministre, populiste né en aristocratie, menteur, drôle et bruyant, cheveux en bataille, mélange de clown blond et de taureau furieux, il fonce, tête baissée, promet la lune du Brexit libérateur mais apporte la débâcle. Du danger d’un bouffon qui voulait être roi…

Par Denis McShane et Laurent Joffrin

Il arrive au sommet mais il est proche de la fin… Il y a parfois une morale en politique : Boris Johnson va tomber par où il est monté, à cause de son aimable cynisme et de son rapport distancié avec la réalité.

Il a joué le tout pour le tout en se prononçant pour le Brexit, sur la simple foi d’une intuition, alors qu’il était sur ce sujet parfaitement agnostique. Il rafle la mise. Seul conservateur notoire à avoir soutenu le « leave », il tient la corde pour le poste de Premier ministre. Dans un premier temps, le parti le juge trop clivant et lui préfère la prudente Theresa May, dont il devient l’exubérant ministre des Affaires étrangères. Mais celle-ci s’enfonce dans le marécage post-Brexit.

Aucune des promesses des brexiters n’est évidemment tenue, l’opération se perd dans les difficultés techniques, on repousse la mise en œuvre tout en jurant que rien ne change, le parti est plus divisé que jamais et, à la Chambre des Communes, on ne trouve de majorité ni pour accélérer la procédure ni pour la reporter.

D’abord ondoyant sur les modalités de la sortie britannique, Johnson sent l’impatience de l’opinion, qui veut en finir d’une manière ou d’une autre et préfère une décision mauvaise à une absence de décision. Il se prononce pour un « hard Brexit », un Brexit dur tandis que Theresa May perd son crédit dans les palinodies parlementaires.

De guerre lasse, les conservateurs mettent Boris Johnson à leur tête et l’envoient au 10 Downing Street. Il louvoie quelque temps, puis décide de dissoudre la Chambre pour laisser le peuple trancher. Son intuition est encore gagnante : les Britanniques en ont assez des années de division et d’hésitation, ils lui offrent la plus forte majorité conservatrice qu’on ait vue depuis 1987.

L’homme du Brexit triomphe, mais l’hubris de la victoire va précipiter sa perte. Il menace l’Union européenne d’une rupture violente, mais ceux qu’il considère comme les gnomes de Bruxelles sont intraitables : il doit accepter un compromis équilibré, contraire à ses promesses. Au moment même où la pandémie de Covid frappe le Royaume-Uni.

Sur le conseil de scientifiques incertains, il refuse les mesures contraignantes et parie sur une immunité collective. Devant l’accroissement du nombre de morts, il doit faire machine arrière et se rabattre à une politique de vaccination conforme à la rationalité.

Il pourrait survivre à ces déconvenues, mais son irrépressible légèreté va le condamner. Désinvolte, toujours prêt à bambocher, il laisse ses collaborateurs organiser des soirées festives en plein Covid, alors même que les Britanniques sont soumis à de sévères restrictions. C’est le scandale du « partygate ». Comme à son habitude, il pense s’en tirer en niant. Mais la vérité finit par prévaloir.

Exaspérés par ses mensonges, ses ministres démissionnent les uns après les autres en 24 heures. C’est la chute, brutale et sans rémission. Il doit quitter Downing Street, le Parlement vote son exclusion, sa carrière politique est terminée. Mais nulle affliction particulière, nul repentir, nulle retraite rédemptrice. Il devient chroniqueur au Daily Mail, un de ses amis, milliardaire, lui fait don d’un million de livres et il donne des conférences rémunérées à prix d’or.

Le bouffon du Brexit en tire bien. Nettement mieux, en tout cas, que le pays dont il a conduit le destin…

A suivre…

 

Article réalisé en collaboration avec lejournal.info


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