Dossier : Femmes iraniennes : le combat continue!
On ne les entendait plus . On redoutait qu’elles aient abandonné. Face à la répression des mollahs . Qu’elles aient renoncé à se battre et fini par accepter de baisser la tête et de porter le voile.
Quelle émotion de les entendre au contraire aujourd’hui affirmer avec fierté qu’elles poursuivent leur lutte ! Dans leur combat, les femmes iraniennes portent l’espoir de leur peuple et celui des autres femmes dans le monde.
Pourquoi donc leur colère était-elle inaudible ? Sans doute, parce que nous ne savons s pas entendre. Et aussi : « Notre colère est canalisée, c’est une colère qui construit », explique l’une d’elles, sur France Inter. « Il ne faut pas gâcher l’énergie de la rage, mais poursuivre la désobéissance civile et humilier le pouvoir ».
Les milliers d’arrestations se muent en autant de femmes qui continuent à lutter de l’intérieur des geôles où elles sont enfermées, parfois à quarante par cellule. Loin de les rebuter, cette promiscuité renforce leur solidarité et encourage leur rébellion. D’où leur conviction : « ce mouvement est irréversible, c’est un mouvement de fond, à bas bruit. Nous ne reculerons plus. Le régime sait qu’au bout de la révolte, il y a la démocratie ».
En Iran, c’est tout un pays qui est en lutte, il n’y a pas de Guide parmi les opposants. Le régime ne peut pas les tuer tous ni les museler , comme l’a fait par exemple Vladimir Poutine en Russie avec son opposant Alexeï Navalny.
Oui, chaque jour, dans les rues de Téhéran, les femmes, surtout les plus jeunes, continuent à marcher, tête haute et nue. Leur façon à elles de revendiquer leur liberté et de défier les gardiens de la révolution qui, elles le savent, peuvent à chaque instant les arrêter et les emprisonner. Ce qu’ils font.
Les hommes, très nombreux, qui les soutiennent en paient le prix fort : sept morts par pendaison en quelques mois . En prison, les nervis du régime humilient, frappent, violent, torturent et parfois tuent. Pourtant, les femmes les défient. Quand il n’y a plus d’horizon, il n’y a plus de peur.
Un exilé iranien arrivé en France il y a trente ans n’en revient pas de voir les jeuens insulter les sbires du régime : » Moi, à l’époque, je n’osais même pas regarder un Gardien de la Révolution dans les yeux… »
Aujourd’hui, sur les réseaux sociaux circule une vidéo de Téhéran. On y voit un chauffeur de taxi, ancien bassidji, s’en prendre à sa cliente qui ose enlever son voile. L’homme jaillit de sa voiture, armé d’une barre de fer et extrait de force la jeune femme. Elle se rebelle, il la gifle, la jette à terre. La voilà debout, sa chaussure à la main, qui fait face, répond coup pour coup. On entend une voix, s’exclamer, sidérée : « Regarde ! Elle savate le bassidji » !
Pourquoi du coup cette obstination du régime iranien à persister à imposer le voile à ces femmes qui n’en veulent? Parce que c’est pour lui le symbole ultime, celui de son contrôle sur l’ensemble de la société iranienne.
Dans un pays où la crise économique empêche la population de manger à sa faim, l’oppression des femmes demeure la base idéologique de la terreur.
Gangrénée par la corruption et l’incompétence, la République islamique a perdu en dix ans 60% de sa richesse [voir l’article de Gilles Bridier], les pauvres meurent de faim et la classe moyenne a disparu. Pour renflouer leurs caisses, les mollahs ont dû normaliser leurs relations diplomatiques avec leur ex mais riche ennemi l’Arabie Saoudite.
Pourront-ils être renversés ? Sur place, la colère ne faiblit pas. À l’étranger, une diaspora forte d’un million de personnes dans le monde, appelle au boycott des autorités iraniennes et s’apprête à porter plainte contre les dignitaires iraniens qui encouragent les fatwas à leur encontre.
Ainsi, du Forum Social du Conseil des Droits de l’homme de l’ONU qui se tiendra début novembre à Genève et dont la présidence est… iranienne. En matière de droits de l’homme, il est vrai, les Mollahs sont imbattables.
Valérie Lecasble
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