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« La marche des damnés. »

publié le 23/11/2015 | par Jean-Paul Mari

« La grande force de ce livre, témoignage
dont vous ne sortirez pas
intact, est de ne jamais verser dans
l’angélisme. Il raconte l’autre face de
la migration »…


« La grande force de ce livre, témoignage
dont vous ne sortirez pas
intact, est de ne jamais verser dans
l’angélisme. Il raconte l’autre face de
la migration »…

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La marche des damnés

Jean-Paul Mari. Le reporter a plongé au cœur de l’odyssée des migrants

Ils marchent. Ils ne savent pas qu’ils
connaîtront l’enfer. Et même l’enfer
qu’on leur racontait doit leur
paraître doux. Ils marchent jusqu’à
trouver le rivage d’une mer, le bord
d’un océan. Ils regardent comment
traverser. La plupart y arrivent. À fond
de cale. Sur des bateaux pourris. Des
pirogues qui ne connaissent pas les
vagues. Certains meurent. Se noient.
La marche reprend. Ils s’adaptent à
tout. À l’étranger. Au froid. À la douleur.
À la misère. À la mort.

Ils apprennent des langues. Ils volent
des mots comme des bouées. Ils
dressent des camps. Ce sont les migrants,
cette armée d’ombres auxquelles
Jean-Paul Mari donne chair.

Jean-Paul Mari a quarante ans de
grand reportage dans ses bagages.
La première fois, il les a vus sur la mer
d’Orient, sur des jonques et des cargos.
Ou sur l’« Île de Lumière ». Ils semblent
bénis des dieux. Ils fuyaient le
marxisme du Vietnam. Aujourd’hui,
ils fuient des continents de flammes
et d’horreur, des fous d’islam qui
tuent, violent et torturent parce que
vous êtes chrétien. Ou rien. Mais que
vous n’avez pas d’argent.

Ils arrivent d’Asie, d’Orient, d’Afrique
jusqu’aux bords de la Méditerranée,
cette mer matricielle vers laquelle
revient aussi l’auteur. Il se souvient
qu’enfant, né en Algérie, il partit
enfant sur un cargo. Il fut un
migrant appelé rapatrié. Jean-Paul
Mari est allé avec eux. Il leur rend leur
identité humaine.

Islam de nuages et de prairies
Dans ces pages, ils ont un nom. Il s’appelle
Robiel. Il est soudanais. Il n’a
plus qu’une moitié de visage. L’autre
est une chose informe. Il essaie de rejoindre
sa fiancée, qui l’attend à
Rome. Ou Zahiel, le doux prêcheur
afghan qui rêve d’un islam de nuages
et de prairies et que les talibans
pourchassent sans trêve. Ou Fassi,
qui veut devenir footballeur et qui
sait que le temps est compté.

Mais la grande force de ce livre, témoignage
dont vous ne sortirez pas
intact, est de ne jamais verser dans
l’angélisme. Il raconte l’autre face de
la migration. Celle qui foule de ses
pieds nus les pays et les gens qu’elle
traverse. Les désordres qu’elle crée.
Les angoisses qui naissent. Et surtout
il dit le noir de l’âme humaine. Les
maisons de torture du Sinaï. Les Bédouins
qui réinventent la traite humaine.
Et soudain la beauté d’un regard.
Il suffit d’une ligne pour raviver
l’espoir.

YVES HARTÉ
y.harte@sudouest.fr

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