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Libye: Un vendredi Place de la Révolution à Benghazi…

publié le 06/07/2011 | par Jean-Pierre Campagne

Une épaisse brume marine envahit la place de la Révolution de Benghazi où des milliers de fidèles, tête baissée, concentrés, écoutent le discours religieux et très politique de l’imam Wanis El Magrok, tournés vers un « avenir meilleur ».


BENGHAZI (Libye), 4 juin 2011 (AFP) – Une épaisse brume marine envahit la place de la Révolution de Benghazi où des milliers de fidèles, tête baissée, concentrés, écoutent le discours religieux et très politique de l’imam Wanis El Magrok, tournés vers un « avenir meilleur ».

« Merci aux combattants qui nous protègent des hommes de Kadhafi, tout notre coeur est avec eux », déclare le chef religieux, sur la place placardée de grandes affiches des « martyrs » de la révolution.
« Nous n’oublions pas nos frères du Yémen, presque tous les présidents arabes font la même chose, ils tuent les civils. Mais Dieu est avec nous », lance l’imam, alors qu’une pluie mêlée de sable tombe sur la place colorée des drapeaux rouge, noir et vert devenus symbole de l’insurrection libyenne, aux côtés de drapeaux français, britanniques et qataris.

Un gamin passe entre les fidèles pour distribuer des prospectus sur un nouveau cybercafé, beaucoup de retardataires arrivent avec leurs tapis sur l’épaule, bouteille d’eau à la main.
Les notables de la ville ont planté à demeure leurs tentes, tout autour de la place, dos aux vents de la Méditerranée.

« Nous ne voulons pas que la Libye devienne un nouvel Irak, un nouvel Afghanistan, nous allons libérer notre pays », poursuit l’imam avant de s’en prendre aux auteurs de l’attentat à la voiture piégée commis mercredi devant un grand hôtel de Benghazi.

« Nos forces ont arrêté trois coupables, j’appelle les autres partisans de Kadhafi à se rendre à la raison, il est fini ».
Le vice-président du Conseil national de transition, l’organe politique de la rébellion, Abdel Hafiz Gogha prend la relève, et la foule crie : « Kadhafi, meurt, meurt, tous les Libyens sont frères ».

Il donne des nouvelles de Misrata, à l’ouest de Benghazi, proie de violents combats entre habitants et soldats du dirigeant libyen Mouammar Kadhafi ces derniers mois, et toujours assiégée dans un rayon de 30 km.
« Pas à pas, nous avançons vers un avenir meilleur », affirme-t-il.
Il remercie la presse internationale de sa présence, « le monde entier » de son soutien. « Nos voulons Kadhafi et sa famille hors de Libye! ».

Un homme au regard triste insiste pour montrer aux journalistes une affiche d’un jeune homme jouant de la guitare. « C’était mon fils Rami Shouad Al Kele, il était ingénieur, aussi guitariste, il a été tué par les soldats de Kadhafi, le 8 mars 2011. Même Obama en a parlé! ».
Plus tard, en fin d’après-midi, des familles marchent lentement sur le front de mer, les drapeaux flottent dans la fumée de kebabs.

Le chanteur de rap, Jihad, roule ses larges épaules dans un tee-shirt noir, il a déjà écrit « deux chansons révolutionnaires ». Pour la musique, il copie sur internet. Il dit beaucoup aimer Los Angeles, pour le prouver il affiche un pendentif en argent aux deux grosses lettres « L.A »

Des enfants font le V de la victoire dans une ambiance de kermesse, Des hommes en armes soldats, policiers, civils patrouillent.
Une horloge affiche « Free Libya », sans indiquer pour autant l’heure de cette libération totale espérée par les insurgés de l’est du pays.
Ramadan, un Tchadien, arrange la tente de son patron libyen, entrepreneur de signalisation routière. Ramadan était arrivé en Libye deux jours seulement avant le début de l’insurrection à la mi-février.

« J’ai un passeport, un visa. Tant que j’ai du travail, je reste, tant qu’on ne me renvoie pas, je reste ».
jpc/asl


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