Série « Les populistes ». Giorgia Meloni et le peuple de Rome (1)
Elle a parlé haut et fort mais se fait discrète, part en guerre contre les institutions mais respecte l’Europe et soutient l’Ukraine. Elle a fondé les « Frères d’Italie », d’extrême-droite, admire Mussolini mais continue à accueillir les migrants, se défend d’ être post-fasciste et se voit menacer sur sa droite par Salvini le dur. Entre dame de fer et dame de feutre, qui est celle qui se définit comme une « femme, une mère, une chrétienne » et défend une vision « sociale, nationale et populaire »?
Qui est la vraie « Giorgia » ? Avec son petit corps grassouillet coincé dans des trois-quarts soigneusement ajustés, son mètre soixante de haut, ses longues mèches blondes savamment décolorées, elle pourrait illustrer une lecture imagée d’un soi-disant « populisme made in Italy ».
Le cliché court les rédactions des journaux : Giorgia Meloni, 46 ans, Premier ministre italien, incarne aujourd’hui « la version la plus parfaite du populisme occidental ». Mais ce n’est pas tout : elle serait aussi « le dernier produit de l’éternel laboratoire politique italien ».
Neuf mois ont passé depuis le couronnement de « Giorgia » après son éclatante victoire: 26% des suffrages et 118 élus aux législatives du 25 septembre dernier. Premier bilan : contrairement aux autres chefs de gouvernement de filiation « populaire », elle ne s’est pas exhibée dans la presse people, à part une séquence de photos de vacances, quelques jours à Cala Masciola dans la région des Pouilles après son retour du conseil européen de Bruxelles. Photo sobre, qui la montre étendue sur un matelas de plage en chemise et pantalons, un verre de jus de fruits à la main.
Discrète et pas exhibitionniste pour un sou « la Giorgia », comme disent les Romains. Toujours le même genre, conforme, pas frimeuse, avec des tailleurs-pantalons strict, gris, bleu, blanc, beige ou rose, signés parfois Giorgio Armani, ou plus modestement H&M. Jouer les divas n’est donc pas son trip préféré. «Populiste » ou pas ce détail ?
Née dans la périphérie romaine , accent populo garanti, habituée à fréquenter la modeste église de Santa Maria del Carmelo, l’église des pauvres, convaincue que l’enseignement des Légionnaires du Christ est le meilleur du monde – elle leur a d’ailleurs confié sa fille – Giorgia Meloni entend faire reconnaitre sa « romanité ». Viscérale et revendiquée. Ou son provincialisme.
Cette soi-disant « Jeanne d’Arc italienne » tiendrait à faire tout toute seule, sans l’aide d’un véritable conseiller, d’un expert, d’un professionnel de l’économie ou de la politique ? Sauf que Giorgia n’est pas seule. Sa famille est bien là, et se révèle souvent plus un poids qu’une aide.
Sa sœur Arianna, 48 ans, chargée du recrutement des adhérents de « Fratelli d’Italia », le parti melonien créé en 2012 sur les restes du très fasciste MSI ( Movimento sociale italiano), ne penserait, racontent les mauvaises langues, qu’à placer ses copains dans des postes clés de l’administration.
Quant au reste de l’entourage, Giorgia a vite exprimé un mouvement de recul devant le canevas autoritaire de ses compagnons de parti, leur immaturité gestionnaire. leurs génuflexions faciles, leurs slogans lugubres, leurs liens tribaux et leurs… « saluts romains ». Pour sa communication, elle a refusé les rendez-vous démagogiques, les conférences de presse à répétition , les effusions télétransmises, les clichés complaisants.
Alors, populiste ou pas, Giorgia ? À bien y réfléchir, si l’on se penche sur ses grands choix politiques, son atlantisme et son soutien à l’Ukraine, elle est moins l’archétype de la populiste bon teint qu’une « populiste à… moitié ». Mezzo, mezzo. Une « demi populiste ».
Ou, si l’on voulait respecter le langage scientifique du politologue Michele Magno : un spécimen de « conservatrice éclairée ». On dit d’elle aussi « une populiste « en route ».
En route, oui, mais vers où ? Voyons…
À suivre…
Article réalisé en collaboration avec lejournal.info
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