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Syrie-Irak : l’Etat islamique peut-il être vaincu ?

publié le 15/06/2015 | par René Backmann

Fort de ses moyens militaires et financiers impressionnants et d’une implantation territoriale en progression, le califat d’Abou Bakr al-Baghdadi exploite les hésitations et les contradictions de la coalition internationale anti-terroriste pour imposer son « ordre islamique » barbare et affirmer sa puissance militaire. Au point de menacer Damas ?


Comment contenir – voire faire reculer – l’État islamique ?

Alors que le califat d’Abou Bakr al-Baghdadi poursuit son expansion en Syrie comme en Irak, les ministres des Affaires étrangères des 22 pays qui constituent le noyau de la coalition internationale anti-jihadistes, réunis mardi à Paris autour de Laurent Fabius, du secrétaire d’Etat adjoint américain Anthony Blinken et du premier ministre irakien Haider al-Habadi se sont séparés sans apporter de réponses convaincantes à cette question. Le représentant du régime de Bagdad, qui avait déploré « l’échec de la communauté internationale » et reproché à ses alliés de préférer « les mots » aux « actions sur le terrain », à l’ouverture des travaux, a obtenu l’appui de la coalition à son plan militaire et politique de reconquête du terrain perdu, mais devra se contenter de ce soutien verbal et de la « détermination totale » affirmée par Laurent Fabius.

Des armes mieux adaptées aux exigences tactiques du moment – comme les missiles anti-char Tow – ont été promises ou sont en cours de livraison. Les 4400 conseillers militaires américains et les détachements plus modestes – quelques centaines d’hommes – fournis par la France, l’Australie, le Canada ou le Royaume Uni, vont poursuivre la formation et l’entraînement des unités de l’armée irakienne. Les frappes aériennes, conduites depuis neuf mois par les États-Unis et une douzaine d’autres pays vont se poursuivre.
Mais il n’a pas été question d’intensifier ces raids et encore moins d’engager des forces terrestres fournies par la coalition.

Accusé par Washington de « manquer de volonté de combattre », l’Irak devra affronter l’Etat islamique avec ses propres forces réorganisées, conseillées et soutenues depuis les airs par la coalition. Quant à l’hypothèse d’une sortie de crise diplomatique en Syrie, elle n’est pas davantage d’actualité, malgré l’affaiblissement réel de la dictature. Principaux soutiens du régime syrien, la Russie et l’Iran ne sont pas disposés, pour l’instant, à lâcher Damas. Moscou a pris quelques distances et organisé deux rencontres entre l’opposition tolérée et des émissaires de Bachar al-Assad mais poursuit son aide militaire.

Et Téhéran qui se déclare résolu à soutenir le régime de Damas « jusqu’à la fin du conflit » vient d’envoyer des renforts de troupes en Syrie. En raison du caractère critique de la situation, Téhéran a exigé et obtenu de Damas, que ces renforts aéroportés – plusieurs milliers de soldats iraniens et de miliciens chiites irakiens – soient déployés, sur des positions défensives dans l’ouest du pays, pour préserver un réduit alaouite prolongé au sud jusqu’à la capitale, que les dirigeants iraniens ne veulent à aucun prix voir tomber entre les mains de la rébellion.

A Paris, la coalition s’est donc bornée à appeler « au prompt lancement d’un véritable processus politique inclusif sous l’auspice des Nations Unies » pour rétablir la paix en Syrie, via la constitution d’un gouvernement transitoire comprenant des représentants de l’opposition et du régime en place. Ce qui n’engage à rien.

Pourtant, comme ne cessent de le relever diplomates, militaires et observateurs aguerris, la situation dans les deux pays est critique. Un peu hâtivement décrit comme en reflux après sa défaite à Kobané, en janvier, puis à Tikrit, en mars – après d’intenses bombardements américains – l’État islamique a démontré qu’il n’en était rien en s’emparant le 17 mai de la ville de Ramadi, capitale de la province irakienne d’Al-Anbar, puis trois jours plus tard, en Syrie de la ville de Palmyre et de ses inestimables vestiges gréco-romains.

En deux opérations victorieuses à 500 km de distance, les jihadistes de l’E.I. confirmaient leur efficacité militaire et l’étendue de leur zone d’influence tout en affirmant une nouvelle fois sur le terrain leur rejet des frontières Sykes-Picot de 1916 et leur volonté de les abolir en établissant sur toute la région leur califat sunnite.

l’État islamique en Irak et au Levant contrôle un territoire de 300 000 km² et de dix millions de personnes

Le constat est implacable : deux ans après la création de l’État islamique en Irak et au Levant, un an après la proclamation du califat, l’organisation d’Abou Bakr al-Baghdadi contrôle un territoire qui couvre près de 300 000 km², où vivent près de dix millions de personnes. Ce territoire qui englobe la moitié de la Syrie et un bon tiers de l’Irak est en partie désert mais il comprend aussi les vallées fertiles de l’Euphrate et du Tigre, au nord de Bagdad, de vastes régions agricoles syriennes et des ressources en hydrocarbures dans les deux pays.

Pourquoi et comment une organisation fondée sur une interprétation fanatique de l’islam, qui gouverne par la terreur et ne recule devant aucun acte de barbarie pour imposer sa férule médiévale a-t-elle pu prendre le contrôle de régions entières du Proche Orient, faire des émules jusqu’en Europe et au cœur de l’Afrique et recruter partout des disciples prêts à mourir pour tuer ?

Pourquoi, en neuf mois pendant lesquels plus de 4000 raids aériens – en majorité américains – ont frappé des cibles du califat jihadiste, la coalition internationale qui réunit plus de soixante pays, conduits par la nation la plus puissante de la planète n’a pas été en mesure de contenir et encore moins d’abattre l’État islamique ?
Les réponses sont multiples.

La première, avancée par un expert militaire familier du terrain est simple : «Les frappes aériennes, si elles épargnent les civils et visent les infrastructures et les mouvements de l’ennemi, c’est-à-dire si elles sont guidées par des spécialistes au sol, sont utiles. Mais elles ne peuvent, seules, affaiblir l’E.I.

En fait, la coalition est aujourd’hui dans l’impossibilité d’imposer militairement un nouveau rapport de forces parce que, face à la guerre non-conventionnelle de l’E.I., aucune de ses composantes n’est prête à déployer des soldats en nombre suffisant pour investir, occuper et tenir le terrain traité par l’aviation. La bataille de Kobané a été remportée parce que les combattants kurdes, qui ont bénéficié d’un soutien aérien intensif et précis des États-Unis, étaient sur place en nombre et ont reconquis la ville maison par maison ».

Or, Barack Obama qui a ordonné en octobre 2011 le retrait des 39 000 derniers soldats américains déployés en Irak depuis le déclenchement de la désastreuse « guerre au terrorisme » de George Bush en 2003, n’a aucune intention de renvoyer des unités de combat dans le guêpier du Proche-Orient, où les intérêts stratégiques immédiats des États-Unis ne sont pas menacés.

A court de moyens humains, matériels et financiers, mobilisés au Sahel et en Centrafrique, Paris qui a cependant engagé des Rafale et des Mirage 2000 dans le ciel irakien est tout aussi catégorique : non à une nouvelle aventure militaire au Levant. Il en va de même pour les autres membres de la coalition, européens et arabes. Personne, pour être clair, n’est disposé à aller au-delà de l’aide financière, de la fourniture d’armes, de l’appui aérien ou de l’envoi de formateurs et conseillers. Exit, donc, sauf martingale stratégique inespérée, l’hypothèse d’une victoire militaire à court terme contre l’E.I.

Plusieurs guerres s’enchevêtrent.

Une autre réponse tient à la nature géopolitique complexe de la crise. Et au rôle capital, et en apparence déroutant, qu’y joue l’Iran. En Syrie, ce sont en effet plusieurs guerres qui s’enchevêtrent. La première oppose les forces fidèles au dictateur Bachar al-Assad à une rébellion armée composite, voire disparate, où coexistent des unités de l’Armée syrienne libre (ASL) en principe peu religieuses, et une profusion de milices ou de brigades islamistes, salafistes ou jihadistes, comme l’Armée de l’Islam, les Libres du Levant ou le Front Al-Nusra, branche locale d’Al Qaida. La seconde oppose la majeure partie de ces forces rebelles, qui veulent la chute de la dictature, à l’Etat islamique, qui cherche à étendre son emprise sans concentrer ses offensives – c’est le moins qu’on puisse dire – contre le régime de Damas.

A cela s’ajoute la rivalité régionale historique entre sunnites et chiites. Depuis le début du soulèvement armé, le régime de Bachar al-Assad doit sa survie aux « volontaires » et conseillers envoyés par Téhéran et aux milliers de combattants du Hezbollah libanais, chiites, armés par l’Iran. Cette implication de l’Iran dans la guerre civile syrienne est l’une des explications majeures de l’appui apporté par l’Arabie saoudite et les pétro-monarchies sunnites du Golfe à la rébellion. Par nature peu portés au soutien des révoltes populaires et des revendications démocratiques, c’est moins un sanglant despote qu’un allié et un obligé des hérétiques chiites que les monarques du Golfe entendaient combattre en aidant la rébellion contre Bachar al-Assad.

« Pour la plupart des capitales du Golfe, relève un diplomate, un sunnite, même un jihadiste fanatique, vaut mieux qu’un chiite ».
C’est donc vers les groupes armés salafistes ou jihadistes, – branche locale d’Al Qaida comprise – que sont allés les pétro-dollars et les cargaisons d’armes en provenance d’Arabie saoudite, du Koweit, des Emirats arabes unis ou de Bahrein, tandis que la Turquie et le Qatar soutenaient les formations proches des Frères musulmans et que Paris, Washington ou Londres, préféraient aider l’ASL ou d’autres groupes armés jugés plus sûrs. Et plus attachés à la chute de la dictature qu’à la gloire de l’islam sunnite.

Le rôle de Téhéran.

Ce qui complique encore le puzzle stratégique régional c’est que Téhéran joue également un rôle majeur en Irak. Mais cette fois, aux côtés de Washington et de ses alliés occidentaux. Depuis le renversement du régime sunnite de Saddam Hussein en 2003, et son remplacement par un pouvoir issu de la majorité chiite, l’Iran exerce une double influence, directe et indirecte sur Bagdad. Directe par ses conseillers, son appui diplomatique et militaire, les liens personnels entre certains dirigeants des deux pays. Indirecte par le soutien que la République islamique apporte aux milices issues de la communauté chiite.
C’est peu de dire que cette évolution n’a jamais été acceptée par Riyad.

Hantée par le spectre de la suprématie régionale iranienne, la monarchie saoudienne qui redoute la constitution d’un « arc chiite », des confins de l’Afghanistan à la Méditerranée, considère le régime de Bagdad comme usurpateur et soumis à Téhéran. Avec les autres monarchies du Golfe, elle a été très active dans l’incitation à la révolte des provinces sunnites, et l’aide aux groupes armés jihadistes irakiens, y compris la branche locale d’Al Qaida, dirigée par Abou Bakr al-Baghdadi, qui fut le creuset de l’E.I.


Instable en raison des tensions politico-religieuses héritées de l’invasion américaine
et de la guerre civile, vulnérable à cause des tares incurables d’une armée, indisciplinée, mal encadrée, peu motivée, dont 30% des effectifs engagés l’an dernier autour de Mossoul, ont déserté, l’Irak doit beaucoup aux puissantes milices chiites – Brigades Badr ou Armée du Mahdi – armées et conseillées par l’Iran. En attendant de pouvoir compter sur des milices tribales sunnites rassemblées et réorganisées, et de pouvoir déployer les 11 000 soldats actuellement formés par des conseillers américains ou français, c’est sur ces phalanges aguerries mais très autonomes ou soumises à Téhéran que Bagdad s’appuie essentiellement aujourd’hui pour combattre l’État islamique.

La coalition internationale se trouve donc aujourd’hui dans la position étrange de soutenir en Syrie les ennemis d’un régime allié de Téhéran tout en soutenant en Irak un régime allié de Téhéran. Le tout, en espérant contenir l’expansion de l’État islamique. Cette contradiction apparente a généré un réel trouble dans le Golfe ou les monarchies sunnites redoutent de voir l’Iran tirer bénéfice de son aide au régime irakien en obtenant des occidentaux sa réinsertion dans le concert des nations fréquentables. Trouble aggravé par les interrogations qui pèsent, dans les capitales sunnites, mais aussi en Israël et parfois à Paris, sur Washington, soupçonné de vouloir conclure avant la fin du mois avec Téhéran un accord sur le nucléaire iranien précipité et insuffisamment contraignant.

Pas de solution sans règlement de la guerre en Syrie…

A l’abri d’une action militaire crédible et résolue, faute de combattants, l’État islamique est donc également protégé par l’exceptionnelle complexité du contexte géopolitique régional où les divisions, les rivalités, les divergences, voire les confrontations d’intérêts interdisent pour l’heure toute opposition ou résistance coordonnée. « Pour nous, admet une source diplomatique, il n’y aura pas de solution au problème que pose l’État islamique tant que nous n’aurons pas résolu la question de la transition syrienne ».

Mais la force de l’E.I. ne tient pas seulement aux faiblesses, aux indécisions, aux contradictions de la coalition. [Voir, sur ce point l’étude de Denis Bauchard, de l’IFRI, disponible ici] L’organisation d’Abou Bakr al-Baghdadi dispose d’atouts qu’il serait imprudent de négliger. Le premier est la dimension territoriale de l’organisation. Contrairement à Al Qaida, qui entend être le fer de lance d’un jihad global, sans base ni limite territoriale, l’E.I. a choisi d’instaurer un califat sur le terrain conquis par ses combattants en Syrie et en Irak.

Sur ce territoire, que certains experts jugent aussi étendu que l’Italie, l’E.I. impose une administration nouvelle, nomme des gouverneurs, perçoit des impôts, et installe des tribunaux de la charia, chargés de faire régner l’ordre islamiste en multipliant les sentences barbares : flagellations, amputations, décapitations en public, crucifixions.

L’objectif apparent est à la fois d’éliminer les mécréants, de terroriser les indécis et d’assurer – comme dans le Cambodge des Khmers rouges – l’émergence d’un « homme nouveau », en infligeant un véritable lavage de cerveaux aux écoliers et en bannissant des études universitaires les disciplines impies comme les beaux-arts ou la philosophie, tandis que l’enseignement du droit est remplacé par l’étude de la charia.

Mais le califat veille aussi à l’approvisionnement des marchés et du commerce, prend en charge les blessés et leurs familles, lutte contre la corruption, verse leur salaire aux fonctionnaires restés à leur poste et tente même de se forger une image de libérateur en dynamitant la prison de Tadmor, à Palmyre, l’un des pires centres de détention et de torture de la dictature syrienne.

Cette ambition étatique du califat, qui revendique aussi des « provinces » en Libye, au Yémen, en Arabie saoudite, en Égypte, en Afghanistan et au Pakistan serait vaine s’il ne disposait pas – c’est son deuxième atout décisif – d’un trésor de guerre très bien garni. Évalué aujourd’hui à 2 milliards de dollars, le pactole de l’E. I. provient d’une demi-douzaine de sources distinctes.

A l’origine alimenté par les donations en provenance du Golfe, les rançons obtenues en échange d’otages et divers rackets et trafics, le budget du califat, régulièrement détaillé, désormais dans ses médias, s’est accru, brutalement d’un milliard de dollars, lorsque ses troupes se sont emparées, il a un, de la ville de Mossoul, récupérant 800 millions de dollars en dinars irakiens et en devises et une partie des réserves d’or de la Banque centrale d’Irak.

Un énorme trésor de guerre

S’ajoutent désormais à ce butin les bénéfices du trafic d’armes et d’antiquités et les revenus tirés de l’exploitation des gisements de pétrole irakiens et syriens qui varient entre 1 et 2 millions de dollars par jour. Grace à une flotte de 200 camions citernes, et des complicités rémunérées au Kurdistan et en Turquie, l’E.I., exporte – après avoir prélevé les réserves dont il a besoin pour son armée et la consommation civile – une bonne partie de sa production à des prix cassés. La coalition s’efforce de tarir cette source de revenus en frappant les centres d’extraction, les raffineries locales, les réservoirs et les convois de camions citernes, avec un succès limité.

« Les cibles doivent être choisies et traitées avec un soin extrême, confie un familier du terrain, pour éviter les dommages collatéraux dans la population civile et pour épargner les livraisons destinées à la consommation quotidienne des habitants, car il ne s‘agit pas d’ajouter des pénuries de carburant et d’électricité aux épreuves qu’ils subissent. L’E.I. qui dispose d’un très efficace appareil de propagande retournerait ces opérations à son bénéfice en exploitant le désarroi de la population ».

Grâce à ce trésor de guerre soigneusement géré par les financiers du califat, l’E.I. peut disposer – c’est son troisième atout – d’une armée très bien équipée dont les soldats reçoivent une solde mensuelle de plus de 500 dollars, sans commune mesure avec les salaire – trois à quatre fois inférieur – versés aux combattants des autres groupes armés. Différence qui explique une partie des ralliements de jihadistes d’autres mouvements à l’E.I.

Évalués entre 50 000 et 80 000 hommes les effectifs de l’E.I. comprennent aujourd’hui un nombre croissant d’étrangers fanatisés par des imams complices ou recrutés via les réseaux sociaux. Selon l’ONU, près de 15 000 étrangers combattaient en septembre sous le drapeau noir de l’E.I. D’après un nouveau rapport transmis au Conseil de sécurité de l’ONU le 19 mai [Document à lire ici : http://www.un.org/en/ga/search/view_doc.asp?symbol=S/2015/358], ils seraient désormais plus de 25 000, en provenance d’une centaine de pays, dont la France qui a fourni plus de 1000 combattants.

La majorité des membres de cette « légion étrangère » ont entre 15 et 35 ans, mais elle comprend aussi quelques vétérans des guerres d’Afghanistan ou de Tchétchénie. L’armement, moderne et abondant de l’armée du califat provient de deux sources principales : le pillage des bases de l’armée syrienne tombées sous son contrôle et la récupération du matériel – des blindés lourds aux Kalachnikov – abandonné sur le terrain, l’année dernière, par l’armée irakienne en déroute.

En Irak, l’E.I. est ainsi entré en possession de pièces d’artilleries avec leurs stocks d’obus, de mines, d’explosifs, de près de 300 chars et de plus de 2500 véhicules tous-terrains Humvees, fraîchement livrés par Washington. La flotte de Humvees est si abondante que certains véhicules sont sacrifiés : chargés d’explosifs et pilotés par des kamikazes, ils sont transformés en bombes roulantes et utilisés, comme lors de la prise de Ramadi, le 17 mai, pour détruire les lignes de défense ennemies ou plus récemment pour attaquer une base de la police, au nord de Bagdad, où l’explosion d’un Humvee piégé et d’un camion de munitions a fait 47 morts. En plus de cet équipement digne d’une petite armée moderne, les forces de l’E.I., fanatisées, mais militairement bien préparées disposent d’un encadrement aguerri et compétent.

L’armée de l’État Islamique.

La majeure partie des officiers et sous-officiers viennent de l’armée de Saddam Hussein, démantelée, après la chute du régime par Washington. Sunnites pour la plupart, donc bannis de la nouvelle armée en construction, ils ont rejoint la clandestinité au sein des groupes rebelles et rallié l’E.I. à sa formation. Le chef d’état-major de l’armée du califat, Izzat Ibrahim al-Douri, qui fut le vice-président du régime baasiste, et figure en bonne place – roi de trèfle – dans le jeu de cartes des individus à capturer ou à abattre distribué aux soldats américains pendant la guerre d’Irak, aurait été tué au cours d’une opération, en avril, dans la province de Salaheddine. Mais la confirmation de sa mort se fait attendre.

Objectif Damas.

Même si l’appétit territorial et la détermination militaire de l’E.I., ont des limites – ne serait-ce que la farouche détermination des Kurdes et des chiites à protéger leur territoire – la conjugaison du contexte international et de ses atouts, pour l’instant préservés, explique les réticences de la coalition internationale à s’aventurer sur le terrain et les résultats modestes du sommet parisien. Dont les populations civiles paient le prix. Elle explique aussi cette confidence d’une source diplomatique occidentale : « pour l’instant, nous n’avons pas de scenario, à court terme, d’une prise de Damas par l’E.I. Mais c’est une hypothèse qui n’est plus exclue ».

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